Secteur laitier : Olé, Olé !

Secteur laitier : Olé, Olé !
Tunis-Hebdo
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  • Abdelmajid Ezzar (UTAP) : «Adopter des mesures radicales pour faire réagir le gouvernement»
  • Karim Daoud (SYNAGRI): «Pour chaque litre de lait produit, l’éleveur perd 280 millimes !»
Mercredi 10 avril, les représentants de l’Union tunisienne de l’agriculture et de la pêche (UTAP) ainsi que ceux de l’UTICA ont décidé de stopper, à partir du 18 avril, la production de lait et de ses dérivés en signe de protestation contre le refus du gouvernement de majorer les prix à la production. Une mesure extrême qui n’est pas du goût du Syndicat national des agriculteurs (SYNAGRI).
Décidément, le secteur agricole n’est pas au bout de ses peines. Mercredi, au ministère de l’Agriculture, l’UTAP et l’UTICA ont tiré la sonnette d’alarme à propos du marasme socioéconomique que traversent les agriculteurs et les pêcheurs, incapables, depuis une dizaine d’années, de vivre de leur activité. Les augmentations du prix de la nourriture des animaux, des médicaments, de l’électricité, du carburant et des charges salariales ont contraint des milliers d’éleveurs à vendre leurs biens ou à s’endetter pour survivre. Depuis 2016, 30% du cheptel tunisien ont disparu ! Confrontés à un gouvernement qui refuse de revoir correctement à la hausse le prix du litre de lait à la production, les membres de l’UTAP et de l’UTICA ont décidé de suspendre pendant trois jours, la production, la collecte, la transformation et la distribution du lait et de ses dérivés. Cette suspension aura lieu du 18 au 20 avril 2019. Le président de l’UTAP, Abdelamajid Ezzar, a commenté cette décision en ces termes : «L’Union avait, à maintes reprises, mis en garde contre le prix élevé des engrais et des semences importées, à cause de la dégringolade du dinar et de ses répercussions sur les coûts de production. Pourquoi dépenser une fortune en devises étrangères pour importer du lait alors qu’il suffit à l’Etat de subventionner, un tant soit peu et de façon régulière, la production nationale ? Il fallait donc que l’on adopte des mesures radicales pour faire bouger les choses. Sachez que l’agriculteur, aujourd’hui, ne cherche plus à gagner mais à survivre». De son côté, et bien qu’il soit davantage concerné par la filière laitière, le SYNAGRI s’est opposé à cette grève, affirmant qu’il n’a pas eu sont mot à dire. Karim Daoud, président du SYNAGRI, n’a pas mâché ses mots à ce sujet : «On ne peut pas dire aux vaches d’arrêter de produire du lait c’est ridicule. Je déplore la décision de l’UTAP et de l’UTICA qui, au lieu de travailler main dans la main avec nous, font cavalier seul pour des futilités. Nous trouvons étonnante cette mesure de grève qui punit, en premier lieu, les petits éleveurs, n’ayant que ça pour subvenir à leurs besoins. De ce fait, le SYNAGRI appelle les centres de collecte de lait à continuer à collecter et à stocker le lait afin de préserver les intérêts des petits éleveurs, de protéger les éleveurs restants, tout en continuant à négocier avec le gouvernement sans nuire au cycle de production.» Le président du SYNAGRI est revenu sur le mal profond qui ronge le secteur agricole dans sa globalité : «Si l’Etat avait accepté en 2016 d’augmenter de 10 millimes par mois le prix du litre à la production, nous aurions eu une révision à la hausse de 240 millimes sans que le consommateur ne s’en rende compte. Malheureusement, le prix du litre à la production est toujours fixé à 860 millimes alors que le coût de revient est de 1140 millimes ! Nous demandons, dans les plus brefs délais, une augmentation de 230 millimes afin que l’éleveur respire un peu.» M. Daoud a, enfin, fustigé la politique de subvention considérant qu’elle est très mal adaptée à la situation : «Jusqu’à quand allons-nous subventionner le lait à l’échelle du consommateur et pour tous les consommateurs ? Soit on subventionne le lait au niveau de la production, soit au niveau des consommateurs les plus défavorisés. J’ai peine à croire que ce gouvernement veut détruire ce secteur. Je pense qu’il s’agit là d’une mauvaise gestion de la caisse de subvention ou le fruit d’une stratégie politique à des fins électorales. De toutes les manières, nous appelons tous nos partenaires, syndicats et membres du ministère à discuter autour d’une même table pour sauver ce qu’il reste de nos cheptels.»

Mohamed Habib LADJIMI Tunis-Hebdo du 15/04/2019




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