Ce qui se joue à Tazarka dépasse le simple cadre d’un problème local de pollution. C’est un révélateur de la crise plus profonde de l’autorité publique face à des intérêts privés puissants et organisés.
Quand une large majorité d’industriels peut impunément rejeter ses eaux polluées dans un écosystème fragile, sans que les sanctions tombent ni que des solutions soient imposées, c’est l’idée même d’un État régulateur qui vacille. La sebkha de Tazarka n’est pas qu’un réceptacle de déchets : elle est aujourd’hui le symbole d’un rapport de force déséquilibré entre environnement et économie, entre légalité et laxisme. La visite d’un ministre ne suffit pas. Il faut désormais que l’État montre, par des actions concrètes, qu’il est encore capable de faire respecter l’intérêt général.
En effet, en visite ce lundi 28 juillet 2025 dans le gouvernorat de Nabeul, le ministre de l’Environnement, Habib Abid, a constaté de visu l’ampleur de la pollution environnementale qui affecte la sebkha de Tazarka (délégation de Korba), notamment à hauteur d’un point de déversement sauvage d’eaux industrielles polluées en provenance de la zone industrielle d’El Mzaraa.
Selon Arfa Nechi, membre du conseil local de Korba pour la région de Tazarka, cette visite ministérielle a permis de mettre en lumière une situation environnementale critique, qui perdure depuis plusieurs années. Des eaux usées industrielles sont régulièrement déversées dans la sebkha à travers un canal sauvage et une installation souterraine maintenue au niveau de la route régionale n°27, sans aucun contrôle des autorités.
Le cœur du problème réside dans le refus manifeste de la majorité des unités industrielles de se conformer aux normes environnementales. Arfa Nechi a révélé que seules 9 unités, sur les 23 implantées dans la zone industrielle, disposent de systèmes de traitement conformes permettant le raccordement au réseau public d’assainissement. Les autres continuent de rejeter leurs eaux usées sans traitement, au mépris total de l’environnement et de la loi.
Cette situation soulève une question troublante : à Tazarka, les industriels imposent-ils leur loi face à l’inaction — voire l’impuissance — de l’État ? Si la visite ministérielle a permis d’attirer l’attention sur cette pollution chronique, les habitants attendent désormais des actes concrets pour mettre fin à une impunité devenue insoutenable.