Affaire Adel Dridi - Les autorités doivent-elles assumer les conséquences de l’arnaque?

Affaire Adel Dridi - Les autorités doivent-elles assumer les conséquences de l’arnaque?
National
print



L’affaire remonte, en fait, à plus de 3 mois. Adel Dridi, fondateur d’une société d’investissement appelée «Yousr Ettanmia», avait été interpellé par les autorités judiciaires en vertu d’une plainte déposée par la Banque Centrale. Il lui était reproché le fait de s’adonner illicitement à une activité bancaire en procédant à la collecte des dépôts et leur restitution à des taux hallucinants. Au bout de quelques semaines, la rémunération pouvait atteindre de 50 à 100% du montant du dépôt. En attendant l’aboutissement de la procédure, le juge d’instruction avait pris des mesures préventives consistant à geler les comptes et avoirs de la société et de son promoteur et à interdire à ce dernier de quitter le territoire. Selon les rumeurs, relayées hier sur les réseaux sociaux, Adel Dridi aurait pris la fuite vers une destination inconnue. Mais cette rumeur a été vite démentie par le vice-procureur auprès du pôle judiciaire, Mr Sadok El Amri, non pas sur la base du fait que les autorités l’ont sous les yeux mais en raison de l’interdiction qui lui est faîte de quitter le territoire voire le Grand-Tunis. Cependant, rien n’exclut l’hypothèse de la fuite malgré cette mesure d’interdiction. Les autorités doivent cependant s’assurer qu’il n’a pas quitté le pays. En effet, il est arrivé de par le passé, la transgression des interdictions administratives surtout lorsque l’affaire est un délit très grave. C’est le cas de cette affaire où à côté du non respect des dispositions de la loi sur les activités bancaires et financières, il existe une suspicion légitime quant à l’origine des fonds et leur utilisation et un risque d’arnaque potentiel. S’agissant de la violation de la réglementation bancaire, l’article 14 de la loi sur les établissements de crédit dispose qu’il est strictement interdit à toute personne de s’adonner à des opérations de banque et d’exercer des activités financières sans y être autorisée par agrément spécifique. La collecte des dépôts étant une activité bancaire par excellence, toute personne voulant s’y adonner doit disposer de l’agrément requis. Mais dans une émission radiophonique diffusée en mars dernier, Adel Dridi avait prétendu qu’il ne collectait pas les dépôts mais offrait des services d’investissement en utilisant l’argent du public dans des projets à rentabilité élevée sans jamais vouloir les citer. Le fait de garder le silence sur ces emplois est en soi un motif de suspicion en vertu de la loi sur la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme. Selon cette loi, tout doit être transparent et tout doit être régulier. L’on se demande, en effet, quel type de projet, par ces moments de crise et de récession, pourrait rapporter en si peu de temps l’équivalent des capitaux investis ? Il faut être naïf, né de la dernière pluie, pour y croire. Les épargnants ne s’intéressent pas tellement à ces aspects préoccupants sous l’angle des dispositions d’ordre public. Ce qui compte pour eux est la rémunération alléchante qui n’a pas son équivalent ni sur le marché monétaire et financier ni sur d’autres marchés, y compris l’immobilier dont la tendance inflationniste est encore à la hausse, et le marché de l’or qui a recouvré ses lettres de noblesse. Cependant, aussi tentante soit la contrepartie de l’investissement, sa mise à disposition n’est pas sécurisée et les autorités ne peuvent pas la garantir de la même manière qu’elles ne peuvent pas garantir la restitution des fonds. La Banque centrale a quand même averti le public par un communiqué laconique où elle rappelle les dispositions de la loi sans insister, comme il se doit sur le risque appréhendé. D’ailleurs, ce risque constitue la hantise des épargnants puisqu’à chaque bobard faisant état de la fuite de Adel Dridi ou de la fermeture de sa société, ils se rassemblent pas milliers pour demander l’intervention de l’Etat et plus précisément de la Banque centrale. Celle-ci, qui n’assume pas la responsabilité de l’insolvabilité ou de la malveillance des faux intervenants, a quand même la responsabilité de mettre en liquidation toute entreprise qui n’est pas en conformité avec la loi sur les établissements de crédit. A un autre niveau, l’enquête préliminaire devait commencer par confisquer, mettre sous scellés et interdire toute activité de la part de la société qui, outre la légitimité de la suspicion, n’a aucune qualité à intervenir sur le marché. La laisser faire malgré la gravité du risque n’exclut pas la responsabilité de l’Etat en faveur des éventuelles victimes.



André Parant juge nécessaire de préserver les acquis démocratiques en Tunisie

Précédent

Tunisie : Séance inaugurale du conseil des régions et des districts

Suivant