A dix jours du coup d’envoi de la Coupe du Monde, Qatar2022, la campagne BoycottQatar2022 bat son plein. En cause, les atteintes aux droits de l’Homme lors de la construction de stades, ainsi que les restrictions décidées par le Qatar lors de cet évènement planétaire.
Des banderoles « BoycottQatar2022 », on en voit désormais chaque semaine dans les stades européens.
Les supporters ont choisi leur camp
Il ne se passe presque pas une semaine sans que des supporters ne hissent des banderoles appelant à boycotter la Coupe du Monde. Les supporters « Ultras », connus pour leur engagement antisystème, voient en ce Mondial la concrétisation du football moderne, basée sur l’argent, les gains et la politique. Un football qu’ils haïssent tant.
Outre ce côté bling-bling, les supporters dénoncent les atteintes aux droits de l’Homme, enregistrées lors de la construction des stades au Qatar. Le pays du Golfe a beau publié et republié des images montrant « les bonnes conditions » dans lesquelles les ouvriers travaillaient, rien à faire. Les multiples enquêtes réalisées par les journalistes indépendants démontrent qu’il y a eu bel et bien des dépassements.
Les supporters dénoncent également les restrictions décidées par le Qatar lors du Mondial : pas d’alcool sauf dans des endroits prédéfinis, pas de fêtes au petit matin, pas de relations sexuelles, pas de ce que le pays du Golfe a qualifié « d’atteinte aux mœurs », etc… Ils dénoncent aussi la répression des droits des personnes LGBT+ ainsi que l’impact écologique désastreux de ce tournoi.
Les supporters considèrent la Coupe du Monde comme une grande fête où on se déplace, justement, pour faire la fête. Toutes ces restrictions ont poussé plus d’un à annuler le déplacement au Qatar.
Bras de fer entre la FIFA et les pays participants
Se rendant compte que le phénomène BoycottQatar2022 prend de plus en plus d’ampleur, la FIFA a réagi et a sommé les 32 pays participants, dans un courrier signé par son président Gianni Infantino et sa secrétaire générale Fatma Samoura, de « ne pas laisser le football être entraîné dans chaque bataille idéologique ou politique ».
La FIFA voulait que les fédérations de ces pays interdisent les banderoles BoycottQatar2022 dans les stades.
Dix des pays concernés ont refusé d’obéir à la demande de la FIFA. En effet, l’Allemagne, l’Angleterre, la Belgique, le Danemark, la Norvège, les Pays-Bas, le Pays de Galles, le Portugal, la Suède et la Suisse, ont réaffirmé, dans un courrier envoyé à la FIFA, leur volonté de « défendre les droits humains, soutenir les travailleurs migrants et continuer à faire pression sur la FIFA ».
La France n’est évidemment pas signataire, appliquant l’adage de Zinédine Zidane, ambassadeur de la candidature du Qatar, faut-il le rappeler : « il faut laisser la polémique de côté, laisser la place au jeu et à la Coupe du Monde ».
Les dix pays ont également signé un courrier conjoint, dans lequel ils demandent des « réponses concrètes » concernant le fonds d’indemnisation pour les travailleurs migrants et le concept d’un centre de travailleurs migrants à Doha.
Des personnalités et des villes
Nombre de personnalités publiques, sportives et autres, ont publiquement annoncé et appelé au boycott de la CM Qatar 2022.
Eric Cantona a déclaré, au Daily Mail dans un entretien publié le 12 janvier, « personnellement, je ne la regarderai pas. Pour être honnête, je ne me soucie pas vraiment de la prochaine Coupe du monde, qui n’est pas une vraie Coupe du monde pour moi. Au cours des dernières décennies, beaucoup d’événements comme les Jeux olympiques ou les Coupes du monde se sont déroulés dans des pays émergents, comme la Russie ou la Chine. Mais le Qatar, ce n’est pas le pays du football. Ce n’est qu’une question d’argent et la façon dont ils ont traité les gens qui ont construit les stades est horrible. Et des milliers de personnes sont mortes ».
De son côté, l’ancien international allemand, et désormais président du comité d’organisation de l’Euro 2024 en Allemagne, Philipp Lahm, a indiqué que, hors raison professionnelle, il n’irait pas assister au Mondial au Qatar, précisant qu’il n’avait « pas envie de s’y rendre en tant que fan. Je préfère suivre le tournoi depuis chez moi. Si, dans ma fonction de directeur du tournoi de l’Euro, j’avais une mission ou un agenda au Qatar, ce serait bien sûr différent ».
Tom Daley, plongeur britannique, champion olympique à Tokyo, ouvertement homosexuel, a appelé, en octobre 2021, au boycott, estimant que « la Coupe du monde qui se déroulera au Qatar est soumise à des règles extrêmes à l’encontre des personnes LGBT+ et des femmes. Je pense qu’il ne devrait pas être permis d’accueillir un événement sportif dans un pays qui criminalise les droits humains fondamentaux ».
Une partie du staff de l’équipe du pays de Galles a fait savoir en juin qu’elle ne rendrait pas au Qatar, malgré la qualification de son équipe, en raison du non-respect des droits des personnes LGBT+.
Plusieurs grandes villes françaises ont indiqué qu’elles ne mettront en place des « fans zones » et ne diffuseraient aucun match du tournoi sur des écrans géants public, et ce qu’importe l’issue des matches pour les Bleus. Il s’agit de Besançon, Brest, Bordeaux, Clermont-Ferrand, la Courneuve, Lille, Limoges, Lyon, Marseille, Nancy, Paris, Reims, Rennes, Rodez, Saint-Etienne, Strasbourg et Tours.
Si ce phénomène semble surtout toucher la France, au vu de l’intérêt par la presse internationale, l’initiative est également suivie par plusieurs communes en Belgique, notamment dans l’agglomération bruxelloise.
La réponse du Qatar
Le Qatar n’a pas répondu officiellement à cette campagne de boycott, mais a fait connaître sa position officieusement, à travers, notamment, les médias qu’elle contrôle.
Sur BeINsport arabe, les animateurs et chroniqueurs ne cessent d’évoquer le sujet en expliquant qu’il est nécessaire de respecter les traditions et la culture du pays hôte du mondial, comme c’était le cas dans tous les autres pays qui ont accueilli auparavant la CM.
De temps à autres, ils rappellent, également, qu’aucune campagne de boycott n’a été orchestrée contre la Russie en 2018, alors que le pays de Poutine est aussi renfermé, notamment en ce qui concerne les droits de l’Homme et les droits de la communauté LGBT+, que le Qatar.
Les personnalités qui défendent le Qatar estiment que les pays occidentaux ne veulent pas qu’un pays arabe organise une Coupe du Monde « qui sera la meilleure de tous les temps ».