La crise Ă©cologique Ă Gabès atteint un point de rupture. Alors que la ville a observĂ© une grève gĂ©nĂ©rale historique contre la pollution du Groupe Chimique Tunisien (GCT), l’expert en environnement industriel Samir Kazbar lance un ultimatum : stopper le dĂ©versement du phosphogypse et la mer MĂ©diterranĂ©e pourrait « retrouver sa santĂ© en un an », rapporte l’agence Tap.
Cette phrase rĂ©sonne comme une promesse fragile dans une rĂ©gion oĂą l’espoir se mĂŞle depuis longtemps Ă la colère, mais elle donne un objectif clair au mouvement de protestation.
Les chiffres accablants du phosphogypse : 200 millions de tonnes déversées
Entre la plage Essalem et Ghannouch, les fonds marins sont recouverts d’une boue acide. Ce sous-produit toxique provient du traitement du phosphate par le GCT.
Près de 200 millions de tonnes auraient Ă©tĂ© dĂ©versĂ©es depuis la crĂ©ation du complexe industriel. Chaque jour, ce sont 15 000 tonnes supplĂ©mentaires qui rejoignent la mer, transformant l’ancienne oasis cĂ´tière en zone rouge.
Selon l’expert Kazbar, mĂŞme si un nettoyage complet exigerait deux Ă trois ans de dragage, « si les rejets cessaient, la mer se rĂ©gĂ©nĂ©rerait d’elle-mĂŞme en un an », assure-t-il.
L’appel radical : Le dĂ©mantèlement du GCT, seul remède sĂ©rieux
Face Ă l’ampleur du dĂ©sastre, et le stockage Ă terre jugĂ© irrĂ©aliste, Kazbar pointe du doigt la seule solution viable :
« Le seul remède sĂ©rieux au drame Ă©cologique de Gabès est le dĂ©mantèlement pur et simple des unitĂ©s polluantes du GCT », affirme l’expert, dĂ©nonçant des installations vĂ©tustes, non conformes et rejetĂ©es par la population.
Gabès : Une grève gĂ©nĂ©rale historique met l’industrie Ă l’arrĂŞt
Ces propos surviennent en plein cĹ“ur d’une mobilisation exceptionnelle. La ville de Gabès a observĂ© ce mardi une grève gĂ©nĂ©rale rĂ©gionale totale, suivie d’une marche pacifique partie de la place AĂŻn Essalem.
La mobilisation a été un succès retentissant : commerces fermés, taxis immobilisés, avec des banderoles brandies par des citoyens mobilisés : « Le peuple veut le démantèlement des unités ».
Selon Ahmed Chelbi, président de la section régionale de la Ligue tunisienne des droits de l’homme (LTDH), la mobilisation a été « réussie à 100 % ».
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L’onde de choc politique : Les « crimes environnementaux » dans le viseur
L’espoir des habitants a Ă©tĂ© ravivĂ© il y a quelques jours par les dĂ©clarations du prĂ©sident KaĂŻs SaĂŻed, qui a Ă©voquĂ© les « crimes environnementaux » commis au nom du profit et de l’impunitĂ©.
Ces propos ont été perçus comme un signal fort par les habitants de Gabès, qui espèrent désormais voir ces paroles se transformer en actes concrets : stopper les rejets, nettoyer la mer et rendre l’air respirable.
Entre une mer qui agonise et une industrie qui s’accroche, Gabès se trouve Ă la croisĂ©e des chemins : celle d’une rĂ©gion qui pourrait, en un an, redevenir vivante — si seulement on la laissait guĂ©rir.
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