Un projet de loi proposé par certains membres du Parlement tunisien a suscité une vive controverse. L’initiative, qui vise à faire payer une partie des frais de scolarité universitaire aux diplômés dans des domaines comme la médecine, l’ingénierie et les spécialités techniques de haut niveau qui choisissent de partir travailler à l’étranger dans les cinq années suivant leur diplôme, fait débat sur la scène politique et au sein de la société tunisienne. L’objectif affiché est de limiter l’émigration des compétences qualifiées et de préserver le capital humain du pays.
Le texte de loi prévoit que les jeunes diplômés dans certains secteurs stratégiques, qui choisissent de travailler à l’étranger, doivent rembourser 50 % des frais de leurs études universitaires dans un délai déterminé, selon un plan de paiement annuel négocié entre le diplômé et le ministère de l’Enseignement supérieur.
L’intention derrière cette mesure est d’inciter les compétences tunisiennes à rester sur le sol national, en créant un frein économique à l’émigration. Les initiateurs de cette loi estiment que la fuite des cerveaux représente un véritable défi pour le développement du pays, particulièrement dans des domaines où la Tunisie manque de professionnels qualifiés.
« Une initiative étrange »
Si l’idée semble, à première vue, répondre à un besoin de rétention des talents, elle a pourtant suscité des réactions négatives parmi de nombreux acteurs politiques, syndicaux et sociaux. Le président de l’Ordre des ingénieurs, Kamel Sahnoun, a qualifié cette proposition de « bizarre » et a précisé qu’elle était en totale contradiction avec la constitution tunisienne.
Selon lui, cette initiative risquerait de créer davantage de tensions sociales, notamment en période de crise économique et de chômage élevé, où de nombreux jeunes diplômés sont contraints de chercher des opportunités à l’étranger pour améliorer leur situation.
Kamel Sahnoun a aussi émis des doutes quant à l’adoption de ce texte, précisant qu’il pourrait ne pas être validé par le président Kaïs Saïed, qui aurait des raisons constitutionnelles de s’y opposer. D’autres parlementaires partagent cette analyse, arguant que cette mesure va à l’encontre de la liberté de circulation des citoyens et pourrait nuire à l’image de la Tunisie à l’international.