Faisant état, depuis quelque temps, d’un débat public houleux quant aux nouvelles dispositions fiscales qu’elle comporte, la Loi de Finances 2023 a été publiée (enfin), dans le JORT, le vendredi 23 décembre 2023.
La première remarque que nous relevons et qui nous semble, à bien des égards, importante a trait au taux d’augmentation du Budget de l’Etat 2023 par rapport aux résultats mis à jour de l’année 2022.
Une hausse de 14,5% qui ne cadre pas, en toute circonstance, avec l’évolution du PIB en 2022 (2,5% au mieux) et qui correspond peu ou prou aux ressources propres de l’Etat même si celles-ci augmenteront, en 2023, à la faveur des « inconditionnelles » recettes fiscales.
Le Budget 2023 en chiffres
69,640 milliards de dinars, c’est la valeur du Budget 2023. Pour rappel, celui de 2022 était de l’ordre de 57 Mds avec ceci d’important à titre indicatif que les ressources d’emprunts extérieurs, évalués à 12,6 Mds, n’ont pas (toutes ou presque) été mobilisées durant l’exercice que nous clôturons dans quelques jours, pour cause de non finalisation d’un accord avec le FMI.
Un scénario qui pourrait se reproduire en 2023 à la lecture du montant des emprunts que l’Etat a budgétisé dans la LDF. L’Etat devrait, en effet, mobiliser en 2023 des ressources d’emprunts d’une valeur de 24,1 milliards de dinars dont 66,2% sont des emprunts extérieurs, principalement des crédits d’appui budgétaire (14,2 milliards de dinars).
Si l’emprunt national ne poserait pas de problème particulier pour sa mobilisation, il en sera autrement pour celui extérieur. Un éventuel échec des négociations avec le FMI, ajouté à la faible notation de la Tunisie, rendraient compromettante toute tentative d’entrer sur le marché des capitaux international. On en saura mieux dans les prochaines semaines quant aux intentions de l’institution de Bretton Woods.
L’autre remarque que l’on souligne à travers la lecture du Budget de 2023 est le développement des ressources propres de l’Etat de l’ordre de 12,9 %, par rapport à la loi de finances rectificative de l’année 2022. Ces ressources devront se situer à 46,424 Mds, du fait de l’importante augmentation prévue des recettes fiscales et non-fiscales de respectivement 12,5 % et 15,7 %.
Nous y sommes. Volet fiscal, les contribuables, quels qu’ils soient, savent à quoi s’en tenir cette année. Ils en gaveront de TVA et d’impôts de tous genres jusqu’à maudire, pour certains d’entre eux, les biens immobiliers qu’ils possèdent. La taxe de solidarité, nous pensons qu’elle fera l’objet d’une désolidarisation tous azimuts, et il n’est pas étonnant qu’on en renonce comme l’ont fait des pays européens.
L’accroissement des recettes fiscales en 2023 s’appuie principalement sur l’importante évolution attendue de l’impôt sur le revenu, et de l’impôt sur les sociétés de 8,5 % et 8,7 %, de la taxe à la consommation, de la TVA, des taxes douanières de respectivement, 16,5 %, 12,5 % et de 11 %.
1,8% de croissance !
Soulignons, par ailleurs, que le gouvernement a opté pour une série d’hypothèses en matière d’élaboration de son budget pour l’année prochaine. Il table, par exemple, sur une croissance du PIB aux prix constants de 1,8%. Pas terrible comme prévision en ces temps où toutes les activités de production accusent une décélération inquiétante. Encore faut-il que l’inflation que les concepteurs du Budget ont prévu ne prendrait pas des proportions démesurées et viendraient fausser l’évolution réelle du PIB !
Ceci étant dit, le Budget de l’Etat n’a de valeur que si les prévisions s’avèrent justes ou proches du réel, tout comme les dispositions n’ont d’effets que si elles sont appliquées et ne donnent pas des effets contre-productifs.
Or, cela n’est pas toujours vrai en ce sens que les prévisions dépendent de facteurs dont nous ignorons le développement, tel le prix du baril, volatil à souhait. Sans parler de dispositions qui provoquent des effets pervers comme celui consistant, par exemple, à taxer le fruit de la vente des actions. Une mesure qui pénalisera le taux d’épargne, déjà bancal.