Partis de la mosquĂ©e Al Fath, au centre-ville, des groupes de salafistes et de jihadistes notoires qui avaient pignon sur rue autour de cette mosquĂ©e rĂ©putĂ©e ĂȘtre un fief intĂ©griste, s’Ă©taient dirigĂ©s le 14 septembre 2012 vers l’ambassade amĂ©ricaine aux Berges du Lac.De la mosquĂ©e Al Fath aux Berges du Lac…
AprĂšs avoir parcouru une dizaine de kilomĂ©tres sans ĂȘtre inquiĂ©tĂ©s, ces groupes sont parvenus jusqu’Ă l’ambassade et ont entrepris de la saccager et la piller. L’Ă©cole coopĂ©rative amĂ©ricaine de Tunis dont les locaux sont proches de l’ambassade a aussi Ă©tĂ© attaquĂ©e et partiellement brĂ»lĂ©e.
C’est au prĂ©texte de manifester contre la diffusion aux USA d’un film sur Internet que ces groupes de salafistes s’Ă©taient dirigĂ©s vers l’ambassade. Ont-ils Ă©tĂ© infiltrĂ©s en chemin par des Ă©lĂ©ments radicaux? Ătaient-ils plutĂŽt belliqueux et en service commandĂ© ? La manifestation a-t-elle dĂ©gĂ©nĂ©rĂ© et Ă©chappĂ© Ă ses organisateurs?
OĂč se trouvent actuellement les principaux suspects ?
Ces questions continuent Ă se poser ainsi que celles ayant trait aux appuis qu’auraient eu ces salafistes violents, quatre ans aprĂšs les faits et un an aprĂšs le procĂšs en appel qui les a visĂ©s.
En effet, les prévenus ont été poursuivis par le parquet et condamnés à des peines de prison avec sursis. Ce verdict clément pour la qualification des faits avait alors suscité la colÚre de Washington qui avait exigé de faire toute la lumiÚre sur cette sombre affaire.
JugĂ©s en appel, pour certains par contumace, une vingtaine de prĂ©venus seront condamnĂ©s Ă des peines allant de deux Ă trois ans d’emprisonnement. Six personnes ont Ă©tĂ© condamnĂ©es Ă une peine de deux ans alors que 14 accusĂ©s en fuite l’ont Ă©tĂ© pour trois ans.
AprÚs ce verdict, le commentaire de Washington a été de constater que les principaux suspects étaient toujours en fuite.
Depuis ce grave incident, des dispositions spéciales ont été prises pour la protection de plusieurs ambassades.
Réactions sécuritaires timorées et appuis occultes ?
Toutefois, plusieurs zones d’ombres persistent quatre annĂ©es aprĂšs les faits. En premier lieu, comment se fait-il qu’une foule en colĂšre ait pu traverser une partie de la ville puis marchĂ© sur une dizaine de kilomĂštres vers son objectif sans avoir Ă©tĂ© maitrisĂ©e, divertie ou au moins encadrĂ©e par les forces de l’ordre?
Ensuite, pour quelles raisons, les secours ne sont parvenus que trĂšs tard sur les lieux de l’assaut? Selon plusieurs sources amĂ©ricaines, Hillary Clinton alors secrĂ©taire d’Etat avait tĂ©lĂ©phonĂ© au palais de Carthage qui d’ailleurs aurait Ă la suite de cet appel dĂ©pĂȘchĂ© la garde prĂ©sidentielle sur les lieux.
D’autre part, de quels soutiens ont pu disposer ces salafistes au sein de la nĂ©buleuse Ennahdha ? La mosquĂ©e Al Fath est en effet le fief de Noureddine Khademi, un faucon de ce parti politique qui Ă l’Ă©poque des faits Ă©tait prĂ©dicateur de cette mosquĂ©e et ministre des Affaires religieuses.
Le jeu trouble des faucons islamistes
Enfin, pour quelles raisons, le processus judiciaire a-t-il trainé en longueur sans que la lumiÚre soit véritablement faite sur les responsabilités et les potentiels commanditaires de cet assaut ?
Cette attaque – une premiĂšre en Tunisie – s’Ă©tait produite au lendemain d’une attaque similaire au consulat US de Benghazi qui fera quatre morts dont l’ambassadeur amĂ©ricain et sur fond de troubles de mĂȘme nature au Caire et Ă Alger avec des manifestations qui dĂ©nonçaient le film « Innocence of Muslims ».
De fait, quatre ans aprĂšs les faits, des zones obscures persistent autour de cet assaut qui avait eu lieu en septembre 2012, prĂ©cĂ©dant de quelques mois les attentats contre Chokri Belaid en fĂ©vrier 2013 et Mohamed Brahmi en juillet 2013. Ces deux affaires aussi attendent que toute la lumiĂšre soit faite depuis lors…
Quid d’Ansar al Charia ?
Enfin, une question se pose concernant le groupe salafiste « Ansar al Charia » officiellement qualifiĂ© d’organisation terroriste le 27 aoĂ»t 2013. Quelle est le degrĂ© de son implication dans cette attaque et quels Ă©taient alors ses liens avec les faucons du mouvement Ennahdha.
Cette question dans sa complexitĂ© conditionne bien des zones d’ombre et des rĂ©seaux occultes qui, depuis les attaques contre le musĂ©e du Bardo, les touristes Ă Sousse et le bus de la sĂ©curitĂ© prĂ©sidentielle, continuent Ă ĂȘtre poursuivis et progressivement dĂ©mantelĂ©s.
Toutefois, la menace terroriste pÚse toujours sur la Tunisie à cause de la prolifération des cellules dormantes et leurs liens avec cette organisation jihadiste maintenant repliée en Libye.
H.B.