Tout le monde connait à peu près cette citation fameuse qui dit en substance : « Je ne suis pas d’accord avec vos idées, mais je me battrai pour que vous puissiez les exprimer ».
Dois-je pour autant accepter en mon âme et conscience que des Tunisiennes du XXIe siècle engagent une grève de la faim pour porter le niqab en classe alors qu’elles peuvent, de plein droit, le porter partout ailleurs ?
Dois-je pour autant me taire lorsqu’on menace un libraire pour qu’il retire un livre de sa vitrine, car la couverture de l’ouvrage représente une peinture orientaliste de femmes au hammam ?
Dois-je regarder ailleurs lorsque des collègues sont tabassés, des représailles promises en cas de non-conformité aux diktats salafistes et des harcèlements systématiques mis en œuvre contre les journalistes, universitaires ou artistes qui oseraient sortir du rang barbu ?
Les choses prennent une tournure plus alarmante jour après jour. Et le silence semble de mise devant toutes ces atteintes à la liberté d’autrui par des activistes décidés à régenter les faits, les gestes et la conscience de la majorité des Tunisiens.
Souvenez-vous, un des acquis précoces de la révolution a été le suivant : désormais, on peut avoir une carte d’identité avec un voile ou une barbe. Cela peut prêter à sourire, mais c’est la stricte vérité. Et de toute façon, à chacun selon ses choix et je ne m’aviserai donc pas de dicter à qui que ce soit des normes vestimentaires ou un look quelconque !
Souvenez-vous des descentes contre les maisons closes, de la tentative d’attaquer la synagogue de Tunis, de la prise de la basilique du Kef, de cent autres événements que personne, dans les hautes sphères de l’État, ne semble vouloir condamner clairement.
Plus près de nous, souvenez-vous de l’affaire de Sejnane ! Et, cela va sans dire, je ne reviendrai pas sur le dossier Nessma, celui du fameux émir des camps de réfugiés ou celui de la fac de Manouba.
Est-ce vrai que plus de deux cents mosquées sont aujourd’hui sous la coupe des intégristes comme le mentionnait un quotidien de la place ? Et si c’est avéré, y a-t-il un pilote dans l’avion ?
En fait, c’est là la vraie question : y a-t-il un pilote qui se soucie de la Maison Tunisie ?
Alors qu’un quasi-million de chômeurs attendent une solution à leur désespoir, nos nouveaux responsables se taisent face aux exactions de leur aile gauche.
Mieux, tout ce qu’ils trouvent de bien à faire, c’est de négocier une pause-prière et s’engluer dans des querelles byzantines à propos du fonctionnement de la Constituante.
Un peu de pudeur, un million de chômeurs vous observent !
Un peu de responsabilité, vos électeurs de quelque bord qu’ils soient vous regardent !
Un peu de courage, vous vous taisez lorsqu’un pays entier attend que vous dénonciez la terreur qui s’installe !
Un peu de dignité, mais c’est peut-être trop vous demander, car, comme chacun sait, vous n’avez fait que vous emparer des espoirs légitimes de la jeunesse.
Osez votre autocritique ! Osez votre autocritique et vous verrez que vous êtes loin, bien loin, des espoirs placés en vous !
Que faire maintenant ? Lutter pour la liberté pardi ! Avec pour credo inébranlable, le respect d’autrui. Ne dit-on pas : « Je ne suis pas d’accord avec vos idées, mais je me battrai pour que vous puissiez les exprimer » ?