La somme de 554.2 millions de dollars provenant de personnalités tunisiennes se retrouve dans les coffres suisses, c’est ce que révèle l’investigation dévoilée ce dimanche 8 février par Le Monde.fr et The International Consortium of Investigative Journalists (ICIJ)[1].
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Le monde dévoile les dessous d’un vaste système d’évasion fiscale accepté, et même encouragé, par l’établissement britannique HSBC, deuxième groupe bancaire mondial, par l’intermédiaire de sa filiale suisse HSBC Private Bank.
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« Entre fin 2006 et début 2007, un informaticien de Suisse, Hervé Falciani, a systématiquement et délibérément récupéré les détails des comptes et clients. Cette action constitue une violation flagrante du droit pénal suisse. Il est accusé d’avoir tenté de vendre les données à des banques libanaises sous un faux nom. Les autorités françaises ont saisi les données volées au domicile des parents d’Hervé Falciani en France. Celui-ci ne les leur a pas livrées volontairement. Depuis, les autorités françaises ont partagé les données avec de nombreux Etats dans le monde. » rappelle la banque HSBC au journal LeMonde.
L’évasion fiscale est définie comme « l’évitement de l’impôt en déplaçant tout ou partie d’un patrimoine ou d’une activité vers un autre pays ».
La Tunisie est classée 59ème sur une liste incluant les pays dont des montants en millions de dollars auraient transité dans des comptes bancaires en Suisse.
Les chiffres liés à la Tunisie
Le montant maximal d’argent lié à un client tunisien est de 72.8 millions de dollars,
349 comptes bancaires ont été ouverts en Suisse durant les années 1970 et 2006,
256 clients sont associés avec la Tunisie, 11% ont un passeport tunisien ou la nationalité tunisienne.
22.083.647 $ proviennent de Belhassen Trabelsi durant la période 2006/2007. Numéro du compte : 48451MH
Fin décembre 2014, les autorités suisses ont annoncé que les fonds du clan Ben Ali, spécialement ceux appartenant à Belhassen Trabelsi, ne seront pas restitués à la Tunisie. La somme s’élève à 35 millions de francs suisses.
En novembre 2014, la direction générale de la fiscalité au sein du ministère de l’Economie et des Finances a annoncé qu’ une police fiscale chargée de lutter contre l’évasion fiscale sera créée, à la faveur du projet de réforme de la fiscalité.
Cette police sera sur terrain dans trois ans, à partir de 2018. Elle aura pour rôle principal l’enquête sur les crimes fiscaux, d’en identifier les responsables et de les présenter à la justice.
Gigantesque fraude à l’échelle internationale
Le Monde, qui enquête sur l’affaire HSBC depuis son origine, est entré début 2014 en possession de données bancaires mondiales, portant sur la période 2005-2007 et établissant une gigantesque fraude à l’échelle internationale.
Selon les enquêteurs, 180,6 milliards d’euros auraient transité, à Genève, par les comptes HSBC de plus de 100 000 clients et de 20 000 sociétés offshore, très précisément entre le 9 novembre 2006 et le 31 mars 2007.
Une affaire dans laquelle fait partie le roi du Maroc, Mohammed VI, classé « client numéro 5090190103 » chez HSBC.
Dans les données de Swissleaks, il y a ceux qui ont hérité d’un compte ouvert, ceux qui ont régularisé leurs comptes depuis bien longtemps comme Gad El Mallek, certains en situation de fraude fiscale et d’autres en parfaite régularité.
La détention d’un compte bancaire en Suisse n’est pas un délit en soi car c’est plutôt la nature des avoirs et leur situation fiscale qui compte, qu’elle soit régularisée ou pas.
[1] L’ICIJ a été fondé en 1997 à Washington. C’était un projet du Center for Public Integrity, une entité indépendante crée par Charles Lewis, un ancien journaliste de CBS. Son financement est privé, il est financé par fondations comme la Packard Foundation ou l’Adessium Foundation. L’ICIJ est dirigé par Gerard Ryle, un journaliste d’investigation australien. Les journalistes qui y font partie sont généralement recommandés par d’autres.