Boum en Ukraine, badaboum en Tunisie !

Boum en Ukraine, badaboum en Tunisie !
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Si les conséquences de la crise ukrainienne sur l’économie nationale ne font pas de doute, en s’en tenant à l’aspect du renchérissement du prix du pétrole et des céréales, on peut espérer que des secteurs comme le phosphate se régénèrent. Le tourisme, les produits intermédiaires d’engrais et, surtout, les revenus du gazoduc reliant l’Algérie à l’Italie et passant par notre territoire sont-ils à même de réduire l’impact de cette crise. Et est-ce suffisant pour pallier la hausse de la facture énergétique ? Le conflit russo-ukrainien affole les marchés. En effet, quand les troupes russes bombardent Kiev et ses environs, le bruit des obus retentissent à Wall Steet, au Nasdaq, à la bourse de Londres, à Paris et à Kabuto Cho (la Bourse de Tokyo). Et l’onde de choc est incommensurable. Tout le monde scrute, instantanément, les meilleures opportunités pour réaliser des plus-values et des gains futurs sur des opérations d’achat et de vente. Que ce soit sur les marchés financiers où les courtiers sont sur le qui-vive, où sur le marché des matières premières où acheteurs et vendeurs sont sur le pied de guerre pour la conclusion de contrats spécifiques. Où en sommes-nous de tout cela ? Le Tunisien lambda peut se demander en quoi cela peut-il nous concerner. Cela est vrai en partie si notre pays assurait sa sécurité alimentaire et ne dépendait pas du monde extérieur pour subvenir à ses besoins industriels, ce que, d’ailleurs, aucun pays, quelle que soit sa puissance, ne peut se targuer de réaliser, à des degrés différents, cela va de soi. Partant de là, tout ce qui se produit sur les marchés, surtout sur celui des matières premières, nous affecte directement ou indirectement. C’est pourquoi, nous devons être attentifs à tout changement de prix, de manière à réduire les surcoûts du renchérissement des prix, notamment des matières premières que nous importons à intervalles réguliers, comme les carburants, les céréales et les produits semi-finis indispensables pour notre secteur industriel. Cela dit, au niveau de notre pays comme au niveau du continent africain et européen, le principal impact à court terme se fera au niveau de l’inflation. Le prix du baril de pétrole tutoie actuellement les 120 dollars alors que les prix du gaz sont extrêmement volatils. En Allemagne par exemple, les prix du gaz étaient autour de 180 euros le mégawatt en décembre, ils sont descendus avant ces évènements, à la mi-février, à 70, puis sont remontés à 140 avant de redescendre à 94 en date du 28 février. A l’instar des autres pays, la Tunisie n’est pas à l’abri de ces turbulences. Localement, une nouvelle augmentation du prix des carburants et, concomitamment, de nombreux articles manufacturiers n’est pas à écarter. A cela s’ajoute l’inflation importée qui risque de ruiner nos réserves de change et spolier notre pouvoir d’achat. Des espoirs de relance ? Le malheur des uns fait le bonheur des autres, dit le dicton, et les pays pouvant tirer profit de ce conflit se bousculent au portillon et font preuve d’opportunisme, ce qui est de bonne guerre en fin de compte, pour réaliser les meilleures affaires. Et la Tunisie doit méditer sur cela. A commencer par le secteur du phosphate et des produits intermédiaires d’engrais (ammoniac, roche de phosphate, soufre) dont la Russie réalise 13% du commerce dans le monde et qu’elle risque de perdre suite au blocus commercial de l’Otan. Vous allez me dire que la Tunisie ne fait pas le poids devant des pays comme le Maroc et les Etats-Unis, les plus grands producteurs de phosphate du monde ! Certes. N’empêche que les commandes risquent de fuser de partout et on doit truster les opportunités, si ce n’est pas pour rentrer dans de nouveaux marchés, du moins reconquérir ceux que nous avons perdus durant cette sombre décennie noire. Il en de même du secteur du tourisme qui va enregistrer, sûrement, dans le monde, des perturbations et des changements de destinations de nature à fuir les zones de conflit et les pays limitrophes des deux Etats belligérants. Notre pays, qui accueille près de 600 mille touristes russes par an, ne serait pas affecté, d’après le spécialiste des voyages, eTurboNews, par le conflit, une augmentation record de visiteurs russes serait même enregistrée en Tunisie, mais aussi aux EAU, en Turquie, aux Maldives et en Egypte, malgré les sanctions économiques. Sans compter les autres marchés émetteurs, comme la France et l’Allemagne qui peuvent revenir en force. Ça va gazer ! S’il y a un secteur en Tunisie qui pourrait tirer profit de cette situation, c’est sans doute celui lié aux revenus du gazoduc reliant l’Algérie à l’Italie et passant par notre territoire. En effet, alors que les Européens craignent une suspension de leur approvisionnement en gaz russe, l’Algérie a annoncé sa disponibilité à approvisionner le Vieux continent. Le géant public algérien des hydrocarbures, Sonatrach, est prêt à fournir davantage de gaz à l’Europe, en cas de baisse des exportations russes avec la crise ukrainienne, en l’acheminant notamment via le gazoduc Transmed reliant l’Algérie à l’Italie, a déclaré son patron dimanche 17 février. En cas d’augmentation des quantités de gaz algérien destiné vers l’Europe, la Tunisie multipliera ses revenus et ses parts en gaz. Selon la ministre de l’Industrie, des Mines et de l’Energie, Neila Noura Gongi, la redevance perçue par la Tunisie sur le passage sur son territoire du gaz naturel algérien vers l’Italie va rapporter, d’après les projections de 2022, environ 500 millions de dinars (MDT). Cette redevance assure 65% des besoins de consommation de la Tunisie en gaz naturel. Et notre pays pourrait augmenter ses revenus de 25% si ce scénario se confirme. A la guerre comme à la guerre !

Chahir CHAKROUN Tunis-Hebdo du 07/03/2022




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