Editorial | Les Anges et les Démons !

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Tunis-Hebdo
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Les sondages d’opinion ont provoqué un vent de panique et engendré un véritable « branle-bas de combat » contre ces candidats inattendus qui sont venus faire vaciller la confiance aveugle de personnalités ou courants politiques, jusque-là sûrs de leur victoire. Apparemment, ils ont fait sortir de leur torpeur la coalition au pouvoir qui postule un deuxième mandat consécutif. « Tahya Tounès », qui joue, actuellement, le rôle du Nidaa et les Islamistes nahdhaouis ne bénéficieraient plus de la « confiance » des Tunisiens qui leur préfèreraient, désormais, des épiphénomènes comme Nabil Karoui ou Kaies Saied ou encore « Aich Tounsi », ou carrément les anciens destouriens en la personne d’Abir Moussi et de son PDL. Ce remodelage inattendu du paysage politique, dû principalement à l’échec total de l’alliance actuelle et de celle qui l’a précédée dans la gestion des affaires publiques, a sonné l’alarme pour amener certaines parties à vouloir changer la donne électorale à moins de quatre mois des scrutins législatif et présidentiel. Car, et au-delà de la nécessité de revoir certaines dispositions de la loi électorale pour la rendre plus efficiente et lui permettre de cristalliser des institutions stables et efficaces, ces amendements à la loi électorale, largement désapprouvés par l’opinion publique, posent un triple problème : éthique, politique et constitutionnel se rapportant à sa forme et à son contenu. Sur le plan de la forme, ces amendements interviennent à quelques mois des élections alors que la loi et les règles démocratiques de l’organisation des élections exigent le délai d’une année, au moins, avant la tenue des élections pour les proposer et les adopter. C’est primordial pour les partis afin qu’ils puissent se réorganiser en fonction des exigences légales électorales (nouveautés relatives au découpage territorial, aux conditions de candidature, etc.). Or, ce délai est largement dépassé et on ne peut plus donc, juridiquement et moralement, prévoir d’autres règles à une échéance aussi proche. La loi l’interdit (elle le limite au découpage territorial, mais a fortiori pour des règles encore plus importantes comme le seuil électoral ou l’exclusion de certaines parties de la course). Même en cas de son adoption par l’ARP, on voit mal l’Instance Provisoire du Contrôle de la Constitutionnalité des Lois laisser passer cette ineptie. Sur le plan du fond, ces amendements visent l’exclusion des nouveaux rivaux pour lesquels on a tissé des « costumes sur mesure » pour tenter de les éliminer de la course: clientélisme et usage des médias pour les uns, apologie de la dictature et de l’ancien régime pour les autres, etc. Tout est bon pour les écarter de la course. Nous avons vu, d’ailleurs, l’alliance Ennahdha, en premier lieu, mettre tout son poids pour faire passer ces amendements, le « gourou » s’étant déplacé lui-même pour faire du lobbying… Apparemment, cela n’a pas suffi d’autant plus que ce qu’on reproche à Nabil Karoui, à titre d’exemple, a été le comportement normal des Islamistes qui ont usé – ils l’ont fait à toutes les échéances électorales précédentes – et abusé de la marginalité économique et intellectuelle de bon nombre de citoyens pour les amener à voter en leur faveur. Nabil Karoui n’a fait que profiter de ce filon au point qu’il apparaît comme le potentiel vainqueur aux deux scrutins, alors qu’il n’a pas encore de parti ! C’est ce qui expliquerait, aussi, semble-t-il, la désertion de l’ARP par certains députés qui ne perdent pas l’espoir de s’agripper à ce personnage, certes sulfureux et opportuniste (il a transformé les reporters de sa chaîne en quêteurs de couffins au Ramadan et ses chroniqueurs en défenseurs acharnés à sa cause), mais qui n’a fait que tirer parti d’un système qui ne fonctionne pas et de la non-application de règles qui existent déjà et qu’on n’a pas besoin de reprendre dans de nouveaux textes. Car, tous les comportements contraires aux principes démocratiques, ou presque,(la transparence financière, le financement étranger, l’apologie du terrorisme ou la non-utilisation de la religion, etc.) sont prohibés, mais personne ne les respecte et aucune institution (ISIE, justice) ne les sanctionne nullement. C’est ce qui explique cette anarchie politique et économique dont les citoyens veulent se débarrasser même, s’il le faut, en se jetant dans les bras du « diable » !

Lotfi LARGUET Tunis-Hebdo du 17/06/2019




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