Billet | La clé sous le paillasson

Billet | La clé sous le paillasson
Tunis-Hebdo
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A l’orée de 2020, une cinquantaine d’entreprises vont très probablement mettre la clé sous le paillasson pour épaissir encore plus le contingent d’ouvriers qui se retrouveront, du jour au lendemain, sans emploi. Ils sont déjà quarante-mille à avoir purement et simplement été privés de boulot durant les huit dernières années parce que les usines où ils travaillent ont cessé de fonctionner et cadenassé leurs portails. Ces chiffres, pour le moins qu’on puisse dire, désastreux ont dopé davantage le taux de chômage, situé aux alentours de 15,5% durant le troisième trimestre de 2018, mais flirtant, aujourd’hui, avec les 18% au bas mot. A cela, il faut ajouter les entreprises étrangères qui ont déguerpi, dès le déclenchement du soulèvement du 14 janvier. L’insécurité qui a régné et qui règne encore, par moments, dans notre pays, la confusion au niveau de la gestion même des affaires de l’Etat et la cacophonie socio-politique dans laquelle nous vivons, depuis bientôt neuf ans, ont eu raison des velléités des investisseurs, lesquels préfèrent remballer plutôt que de continuer à prendre des vessies pour des lanternes. Moralité : sur les vingt mille entreprises actives en Tunisie, plus de quatre mille ont procédé à une cessation de service, préférant tout arrêter ou délocaliser leurs activités en les déplaçant hors-frontières. Dans tout cela, il y a bien évidemment des secteurs qui sont touchés plus que d’autres, tel celui du cuir et des chaussures ou encore celui des textiles, c’est là où le chômage a frappé avec force. Indépendamment des facteurs sociaux ou des données inhérentes à la situation politique, les analystes ont tiré les premières conclusions de cette situation plus que déplorable qui augure d’un marasme industriel, et conséquemment économique, sans précédent. Selon ces analystes, 30% des entreprises concernées par ces menaces de faillite n’ont enregistré aucun bénéfice depuis 2016, alors qu’elles sont sujettes à une fiscalité rigoureuse. Sur un autre plan, ces mêmes entreprises sont victimes d’une concurrence déloyale à laquelle la contrebande n’est pas du tout étrangère. L’économie parallèle qui s’est épanouie depuis 2011, devenant un secteur florissant et rapporteur pour les trafiquants de tout acabit, a littéralement écrasé le tissu industriel national. L’actuel gouvernement est-il conscient de tout cela ? Non. Fait-il quelque chose pour atténuer, un tant soit peu, cette crise qui perdure menaçant le pays d’une totale banqueroute ? Non. L’amertume des Tunisiens n’a d’égal que le sentiment d’impuissance qu’ils éprouvent face à la démission générale et généralisée et des gouvernants et des acteurs politiques. Il y a, chez nous au moins deux à trois entreprises qui ferment boutique, chaque jour, léguant à ce pays des centaines de chômeurs et derrière eux des familles et des bouches à nourrir. Quel sort pour ces gens-là, quel sort pour une économie qui, du jour au lendemain, se retrouver dépourvue de ce qui faisait sa force, à savoir l’investissement industriel, local ou étranger ?

Imed BEN HAMIDA Tunis-Hebdo du 27/05/2019




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