Les deux blocs parlementaires de Nidaa Tounes et Machrouû Tounes ont publié, mercredi 15 août, un communiqué conjoint faisant part d’un front parlementaire commun entre les deux groupes.
Cette coalition est basée, essentiellement, sur quatre points, à savoir la révision de la loi électorale, la mise en place de la Cour Constitutionnelle, l’élection d’un nouveau président de l’ISIE et l’adoption d’une loi de finances.
Afin de cerner les objectifs de ce front et ses perspectives d’avenir, nous avons contacté Hassouna Nasfi, député de Machrouû Tounes.
T.H : Vous avez annoncé un front parlementaire commun avec Nidaa Tounes, alors que ce parti est un allié d’Ennahdha, votre ennemi politique numéro un. Comment cela se fait-il ?
Ce front est basé sur les quatre points cités dans le communiqué conjoint des deux blocs parlementaires. Nous partageons les mêmes visions avec Nidaa concernant ces points, et il s’agit de points de discorde entre Nidaa et Ennahdha. Ce front n’est pas en relation directe avec les affaires partisanes, cela se fera peut-être dans un deuxième temps. Nous croyons qu’il est impossible de parler d’un front politique sans qu’il y ait d’abord un front parlementaire parce que le pouvoir s’exerce réellement à l’ARP. Nidaa Tounes a répondu positivement à notre proposition de mettre en place un front parlementaire, ce que nous avons essayé de faire auparavant, mais en vain.
T.H : Qu’est-ce qui a fait que votre proposition ait abouti cette fois-ci ?
Les choses changent en politique. Aujourd’hui, nous partageons les mêmes approches avec Nidaa Tounes concernant des sujets de premier ordre. En plus, Ennahdha et Nidaa sont en discorde sur ces mêmes points. Politiquement, Nidaa Tounes aurait dû être la locomotive au Parlement, mais c’est Ennahdha qui l’est devenue parce que le bloc de Nidaa a été amoindri et s’est écarté des principes sur lesquels il a été fondé. Aujourd’hui, les responsables de Nidaa sont conscients qu’il faut rectifier le tir. Ce front est devenu primordial et nous appelons les autres blocs parlementaires progressistes à nous rejoindre.
T.H : Ce front a donc pour objectif de contrer Ennahdha ?
Non, cela n’a rien à voir avec Ennahdha. Politiquement, Ennahdha doit suivre les forces progressistes au Parlement et non pas contrôler l’ARP et imposer ses idées. Le combat aujourd’hui tourne autour de qui entre Ennahdha et les forces progressistes sera la locomotive sous la coupole du Bardo.
T.H : Mais selon votre communiqué, il s’agit d’un Front sur quatre points qui n’ont rien à voir avec le progressisme.
Au niveau des candidats à la Cour Constitutionnelle, il y a une différence, que ce soit en termes de positions ou d’appartenance. Il s’agit bel et bien d’une différence entre progressistes et non-progressistes. Aujourd’hui, il y a un groupe parlementaire qui essaie de reporter les élections.
T.H : Les problèmes de l’élection des membres de la Cour Constitutionnelle émanent d’Ennahdha comme du Nidaa.
Où est le problème ? Quand les forces progressistes entament les élections de la Cour avec 100 députés derrière un seul candidat, cela vaut mieux que 50 députés derrière des candidats éparpillés. Regardez ce qui se passe au sein de l’ISIE. Elle est devenue sous le contrôle d’Ennahdha. La crise de cette institution émane d’Ennahdha.
T.H : Vous n’arrêtez pas d’évoquer Ennahdha. Selon vos propos, l’objectif de ce front est de contrer Ennahdha.
Non. Je n’utiliserais pas le terme « contrer ».
T.H : Y aura-t-il une position commune entre les blocs de Nidaa et Machrouû concernant Youssef Chahed ?
Il n’y a pas d’accord concernant ce point pour le moment. Il y a d’autres priorités. Nous avons préféré ne pas évoquer les sujets qui peuvent créer une discorde entre les deux blocs.
Meher KACEM
Tunis-Hebdo du 20 Août 2018