Après la stagnation, le sursaut
C’est un souffle timide, mais réel. Dans le paysage industriel tunisien, trop souvent freiné par la lenteur administrative et les incertitudes politiques, les industries mécaniques et électriques retrouvent enfin des couleurs.
Relayée par l’agence TAP, l’information émane du dernier sondage semestriel sur l’investissement réalisé par l’Institut national de la statistique (INS) : le solde d’opinions positives dans ce secteur est passé de 6 % au second semestre 2024 à 23 % un an plus tard.
Un bond qui, dans le langage feutré de la statistique, traduit une reprise de confiance chez les industriels et leurs partenaires étrangers.
Le moteur européen redémarre
Ce réveil s’explique d’abord par la reprise de la demande européenne, destination de près de 77 % des exportations tunisiennes dans ce domaine.
Entre janvier et septembre 2025, les exportations mécaniques et électriques ont progressé de 6,4 %, pour atteindre 22,7 milliards de dinars, selon les chiffres de l’INS. Les produits électriques, plus dynamiques, grimpent de 10,4 %, quand le mécanique stagne à +0,5 %.
Mais l’essentiel est ailleurs : ces secteurs portent à eux seuls près de la moitié des exportations nationales, confirmant que la Tunisie industrielle reste, avant tout, une Tunisie câblée à l’Europe.
L’investissement reprend, mais à deux vitesses
L’enquête de l’INS dresse cependant un tableau contrasté : l’investissement repart dans les industries chimiques (+21 points) et agroalimentaires (+16 points), mais ralentit dans les matériaux de construction et les industries diverses. Le textile et le cuir, symboles d’un passé manufacturier en mutation, restent stables.
Ce déséquilibre révèle une réalité : la relance industrielle tunisienne n’est pas homogène, elle se concentre sur les secteurs à haute valeur ajoutée et les chaînes intégrées à l’économie européenne.
Une stratégie à l’horizon 2035
Le gouvernement parie sur cette dynamique pour déployer sa Stratégie de l’industrie et de l’innovation à l’horizon 2035, un plan ambitieux censé créer 840 000 emplois et porter les exportations à 36 milliards de dinars.
Le texte, conçu comme une feuille de route de la réindustrialisation, mise sur la transition numérique, la montée en gamme technologique et la formation des compétences locales.
Mais il lui faudra composer avec une réalité : un tissu industriel fragmenté, souvent dépendant des sous-traitances européennes, et un environnement d’affaires encore marqué par l’instabilité fiscale et logistique.
Avec 4713 entreprises manufacturières et 530 000 emplois directs, la Tunisie dispose d’un socle solide.
Près de 45 % des sociétés sont totalement exportatrices, générant 67 % des emplois industriels et plus de 45 milliards de dinars d’exportations par an.
L’enjeu désormais est clair : convertir la relance en transformation.
Faire de la mécanique et de l’électricité non plus un simple relais de croissance, mais le cœur d’une souveraineté industrielle repensée.
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