Quelle stratégie Nessma prépare-t-elle en vue du procès du 23 janvier ? Actuellement, la chaîne est totalement versée dans la CAN de handball jusqu’à occulter, en partie, les plateaux consacrés à l’actualité politique. Elle tente, cependant, par le biais de son service de presse, de mobiliser les journaux, les intellectuelles et l’ensemble de la société civile.
Des communiqués sont envoyés aux différents médias pour appeler à une mobilisation massive en faveur de la liberté d’expression.
C’est vraisemblablement en ce sens que Nessma veut contrer la fronde des islamistes et des citoyens qui les soutiennent. La riposte consisterait à déplacer le débat de manière à en faire un problème d’ordre national concernant la liberté d’expression et non pas le simple fait de la diffusion de « Persepolis » ou des orientations du directeur de la chaîne, Nabil Karoui. Ce qui est, par ailleurs, intelligent comme manœuvre, parce que cela permettrait de faire adhérer le maximum de gens à ce combat pour la liberté et de le soustraire à la logique du « fait-divers ».
C’est donc en ce sens qu’un comité de soutient à la chaîne a été crée et qu’une pétition a été publiée sur le Net à propos de la liberté d’expression, preuve que l’on tient à donner à l’affaire une dimension nationale. Le directeur de la chaîne tentera, en quelque sorte, de mettre tous les épris de liberté de son côté même si certains d’entre eux contestent le choix qui a été fait au départ par la chaîne.
Ceci dit, et cela expliquerait la stratégie de Nessma, il s’agit bien d’un combat, pour la liberté d’expression, parce que les détracteurs de la chaîne, parmi les Islamistes ou autres, ne cherchent pas à « sanctionner » un « manquement » au sacré, mais à faire taire les voies différentes et les sons de cloche qui vont dans le sens de la liberté.
Le procès du 23 janvier sera houleux, peut être plus que houleux, puisqu’il consacrera, encore une fois, le fossé qui se creuse de plus en plus entre deux composantes de la société, l’une milite pour le droit à la différence et l’autre pour un seul et unique moule. L’affaire de Nessma ne sera qu’une brique de plus dans le mur de l’incompréhension qui est en train de s’ériger au sein d’une même société, et cette affaire devient, par conséquent, un test de plus pour la jeune démocratie tunisienne : ou la liberté passe ou elle se heurte à l’intolérance et l’extrémisme.