Décembre 2024, Tunis. Si l’on devait choisir entre un kilo de cocaïne et un kilo de pommes de terre, on pourrait penser que ces deux produits n’ont rien en commun. Et pourtant, le 9 décembre, ils ont fait la une ensemble, incarnant à leur manière l’inquiétante montée de l’économie parallèle et des pratiques illégales en Tunisie. Deux saisies d’ampleur, l’une dans le domaine de l’alimentation, l’autre dans celui du narcotrafic, illustrent parfaitement le défi auquel sont confrontées les autorités : maîtriser un marché en proie à la spéculation, tout en démantelant les réseaux criminels.
Dans le cadre de la gestion des tensions sur l’approvisionnement, notamment en pommes de terre, et pour lutter contre les pratiques de spéculation et de monopole, les services de contrôle ont intensifié les inspections sur le terrain.
À Sidi Hussein, ce sont pas moins de 5000 kg de pommes de terre qui ont été saisis dans un entrepôt clandestin, sans aucune trace légale de provenance. L’objectif de cette opération ? Mettre un terme à l’exploitation illégale du marché des légumes de base et empêcher la hausse des prix, orchestrée par des acteurs peu scrupuleux.
L’affaire a pris une tournure presque surréaliste, comme si les pommes de terre rivalisaient avec les stupéfiants en termes de contrebande. Cette saisie n’a pas manqué de faire parler : les autorités ont remis les pommes de terre saisies dans les circuits commerciaux pour en réguler le prix, une action saluée comme un pas vers la régulation des pratiques commerciales.
Mais au Bardo, le décor change. C’est un kilogramme de cocaïne qui a été découvert dans une maison, lors d’une opération menée par les forces de l’ordre dans le cadre de leur lutte incessante contre les réseaux de trafic de drogue.
Alors que la saisie des pommes de terre relevait d’une volonté de préserver l’ordre économique, celle de la cocaïne était une opération de démantèlement de réseau criminel, bien plus complexe et dangereux. Ce n’est pas seulement un kilo de drogue qui a été saisi, mais également des véhicules, de l’argent et des bijoux, signe d’une organisation criminelle bien établie.
Si ces deux saisies peuvent sembler appartenir à des mondes complètement différents, elles révèlent pourtant une réalité commune : l’impossibilité de réguler efficacement des secteurs où l’illégalité s’invite en toute impunité.
D’un côté, des spéculateurs qui exploitent la crise alimentaire pour gonfler les prix et, de l’autre, des narcotrafiquants qui exploitent la misère sociale pour faire prospérer leur marché.
Les deux phénomènes, bien qu’ayant des impacts différents, déstabilisent la société tunisienne, l’un par l’inflation des prix des denrées alimentaires, l’autre par l’invasion des drogues.