Depuis le 14 janvier, date de la chute de la dictature de Ben Ali, les temps semblent s’accélérer à une vitesse vertigineuse. Le 23 octobre 2011 a entériné la Révolution des braves à travers les premières élections libres et démocratique que le pays n’a jamais connues. Un mois après, le 22 novemebre, presque jour pour jour, l’inauguration de l’Assemblée Nationale Constituante a mis la pierre philosophale d’une nouvelle Tunisie pour l’établissement d’une Constitution de la 2ème République. Journée mémorable s’il en est, qui a vu les 215 élus par le peuple (deux étaient absents) prêter serment dans une ambiance des plus solennelles.
Cette journée inaugurale, qui marque la naissance d’une Tunisie tournée résolument vers la voie de la souveraineté du peuple intégrant le concert des pays démocratiques, a connu des moments forts. Peut-être l’attitude de Maya Jribi, l’élue du PDP dans la circonscription de Ben Arous, en est-il une illustration de par sa décision de présenter sa candidature pour la présidence de l’Assemblée constituante face à Mustapha ben Jaâfar. Décision qui a incontestablement valeur de symbole dès lors que la troïka (Ennahdha, CPR et Ettakatol) avait déjà choisi le secrétaire général du parti Ettakatol pour ce poste. Interrogée sur le motif de sa candidature alors que le verdict ne comportait aucun suspense, la figure de proue du PDP souligne le sens de son geste : en finir avec la candidature unique et conférer un signal fort à cette investiture, arguant qu’ « il ne peut y avoir de démocratie sans pluralisme, et de pouvoir sans contre-pouvoir. »Sans surprise, elle obtiendra 68 voix contre 145 pour le candidat favori de la troïka.
Dans son discours inaugural de Président de l’Assemblée, Mustapha ben Jaâfar fera montre d’une remarquable courtoisie, invitant Maya jribi à prendre la parole. Visiblement émue par ce geste, la colistière de Ahmed Néjib, vêtue d’un ensemble bleu marine, le visage rayonnant sans le recours à un adjuvant cosmétique, déclame un discours d’une remarquable limpidité où la dignité le dispute à l’élégance. Par son ancrage résolu dans le camp de l’opposition, Maya Jribi a exprimé sa volonté et celle se son parti d’assumer le rôle choisi dans l’enceinte de l’Assemblée, dans le dessein d’être à la hauteur des attentes du peuple, et de servir la nation.
Par son discours percutant, improvisé et d’une teneur tout à fait exceptionnelle, Maya Jribi a ému tous les élus, toutes sensibilités confondues. Elle prend ainsi une nouvelle dimension. Celle d’une femme politique qui sera, sans nul doute, le pôle d’attraction d’une opposition qu’elle conçoit éminemment constructive. D’ores et déjà, des tractations s’amorcent quant à la mise en place d’un rapprochement des forces du progrès, selon ses dires ce matin sur la chaîne radiophonique « Shems FM ».
Au rythme où vont les choses, il n’est pas exclu de voir l’incontournable Maya Jribi, propulsée à la tête d’un pôle progressiste, qu’elle saura, certainement, conduire avec détermination et doigté. Le charisme qui est le sien et son itinéraire de militante invétérée seront des atouts majeurs.