À la suite des déclarations de M. Marzouki à Hannibal TV concernant l’extradition de Baghdadi Mahmoudi, de laquelle l’on peut déduire que la décision de le remettre aux autorités libyennes ne va pas avoir lieu, le chef du gouvernement a fait savoir à l’AFP que l’extradition peut valablement s’opérer sans signature du Président de la République. Il a ajouté, dans ce cadre, que le tribunal administratif a été consulté sur ce point.
Au-delà des volets politiques et des considérations rattachées aux droits de l’homme qui ne seront pas traités dans cet article, la position exprimée par le chef du gouvernement et confirmée par le tribunal administratif pousse à nous interroger sur la loi en vigueur régissant la procédure d’extradition en Tunisie.
De toute évidence, la constitution de 1959 qui a été suspendue en mars 2011 ne peut pas être le fondement juridique pour édifier sur la faisabilité de l’extradition et ses modalités . Et de toutes les façons, la constitution de 1959 prévoit seulement l’interdiction d’extrader les réfugiés politiques ( article 17 ).
Quant à la mini- constitution promulguée par la loi constituante du 16 décembre 2011, elle est lacunaire et ne traite pas de la question ni dans le cadre des pouvoirs du président de la République ni dans celui du gouvernement.
L’article 11 de la mini-constitution, énumérant, limitativement, les attributions du Président de la République ne lui reconnaît pas le pouvoir de décider en la matière et l’article 17 définissant les pouvoirs du gouvernement confie à cet organe l’exercice du pouvoir exécutif sous réserve des attributions du Président de la République.
À première vue, l’extradition peut être décidée discrétionnaire par le gouvernement qui dispose de pouvoirs généraux et indéfinis à l’exception de ceux dévolus au président.
Seulement, les dispositions de l’article 17 susvisé étant générales, leur application au domaine des libertés et des droits de l’homme est inappropriée. Dans ce domaine, les constitutionnalistes et les militants des droits de l’homme préconisent des dispositions explicites et précises pour limiter les abus et les bévues.
Or, le seul texte explicite, actuellement en vigueur, est l’article 324 du code de procédure pénale entré en application en 1968. En vertu de cet article : « le gouvernement est libre d’accorder ou non l’extradition. Si l’extradition est décidée, le secrétaire d’État à la justice propose à la signature du Président de la République, un décret autorisant l’extradition. Si dans le délai d’un mois à compter de la notification de cet acte, l’extradé n’est pas reçu par les agents de l’État requérant, il est mis en liberté et ne peut plus être réclamé pour la même cause ».