Plusieurs associations, organisations et collectifs de la société civile tunisienne et de l’immigration s’insurgent contre le «partenariat de mobilité UE-Tunisie» présenté comme une simplification du visa pour les Tunisiens et une plus grande ouverture à l’immigration régulière. Partenariat visant, à première vue à faciliter la circulation des personnes entre l’UE et la Tunisie et à promouvoir une gestion commune et responsable des flux migratoires existants, notamment à travers la simplification des procédures de l’octroi de visas, selon la Commission européenne.
Or les associations, organisations et collectifs dénoncent cette politique d’externalisation des frontières, «masquée». Dans une action, lancée depuis des semaines, ils disent «halte au dictat de la Commission européenne et non à l’accord de mobilité et demandent qu’un dialogue et une concertation soient engagés en vue de fonder une nouvelle politique migratoire digne de la révolution tunisienne», demandant entre autres, que l’ANC ne ratifie pas cet accord.
«Après la signature à Bruxelles en catimini de l’accord de mobilité avec l’Union européenne, Mr. Jomaa, vous avez fait ce que le gouvernement de la Troïka n’a pas osé faire !» dénonce ce collectif d’ONG de tunisiens à l’étranger, soutenu par plusieurs associations tunisiennes. Il avait appelé Mehdi Jomaa, le 3 janvier dernier, en sa qualité de futur chef du gouvernement, à refuser la signature de l’accord de mobilité proposé par l’UE d’autant plus que cet accord sur la mobilité consacre le principe de «l’immigration choisie».
En échange, la Tunisie bénéficiera d’une aide pour mieux contrôler les flux de migrants, non seulement tunisiens, mais aussi subsahariens, pour lesquels notre pays est devenu une zone de transit en vue de gagner l’Europe.
Pour les organisations de la société civile qui dénoncent ce texte, il ne s’agit rien de moins que d’une «externalisation des frontières masquée». En d’autres termes, les frontières européennes se déplaceront vers la Tunisie qui se transformera ainsi en «future zone-tampon».
«Dès que vous avez été choisi pour conduire un nouveau gouvernement, nous vous avons adressé le 3 janvier 2014 nos remarques sur les questions vitales de l’immigration et des Tunisiens vivant à l’étranger.
Cette adresse reprenait plusieurs demandes faites avec nos partenaires tunisiens et internationaux demandant, force est de le constater, vainement une concertation. Nous vous y demandions de « Refuser la signature de l’accord de mobilité proposé par l’UE dont l’approche sécuritaire et plus qu’évidente et qui est une autre façon d’imposer une externalisation des contrôles migratoires ».
Malheureusement, vous avez préféré signer cet accord dans la précipitation et sans concertation en particulier avec les associations de l’immigration en Europe. Alors que le précédent gouvernement a cédé à la demande de la société civile tunisienne et de l’immigration et n’a pas signé l’accord, malgré le fait que la commission européenne n’a pas cessé de le harceler faisant fi du grave contexte dans lequel se trouvait le pays.
Cet accord tourne le dos aux intérêts des Tunisiennes et des Tunisiens. Il est du même type et de la même nature que les accords antérieurs du temps du régime de la dictature de Ben Ali. Il est au service d’une politique migratoire indigne et égoïste qui choisit d’organiser la fuite des cerveaux et des jeunes diplômés avec les visas longs séjours. Alors que les milliers de jeunes ayant franchit la méditerranée au péril de leur vie sont exclus de l’accord et leurs demandes légitimes d’examen de leurs situations sont ignorées.
A cause de cette précipitation, la Tunisie sera obligée de prendre part à la politique répressive de l’Union Européenne et d’accepter les refoulements de sans-papiers quelles que soient leurs nationalités».
Les associations démocratiques de l’immigration tunisienne,
– dénoncent fermement la signature de cet accord lundi (dernier) à Bruxelles, obtenue par un véritable chantage, et demandent à tous les députés de l’ANC de ne pas le ratifier.
– demandent l’ouverture immédiate de concertation avec le gouvernement afin de remettre à plat la politique migratoire tunisienne qui ne doit plus obéir au dictat de la Commission Européenne mais aux seuls intérêts des Tunisiennes et Tunisiens conformément aux principes de dignité amenés par notre révolution».
Les signataires sont l’Association Démocratique des Tunisiens en France (ADTF), l’Association Interculturelle de Diffusion et de Documentation Audiovisuelle (AIDDA), l’Association des Tunisiens en France (ATF), le Comité des Assises de l’Immigration Tunisienne (CAIT), le Collectif des Femmes Tunisiennes, le Comité Pour le Respect des Libertés et des Droits de l’Homme en Tunisie (CRLDHT), le Collectif 3C, le Collectif Tunisien pour la Démocratie et les Libertés (CTDL), la Fédération des Tunisiens pour une Citoyenneté des deux Rives (FTCR), le Mouvement des Citoyens Tunisiens en France (MCTF), le Réseau Euro-Maghrébin Citoyenneté et Culture (REMCC), l’Union des Travailleurs Immigrés Tunisiens (UTIT), le Parti des Travailleurs de Tunisie (Section France), etc.