La marche organisée samedi 6 décembre dans le centre de Tunis pour dénoncer la criminalisation de l’opposition a rassemblé entre 1 000 et 2 000 personnes. Modeste dans sa taille mais notable dans son contexte, cette mobilisation – la troisième en deux semaines – confirme que la contestation continue de s’exprimer malgré les arrestations liées à l’affaire du « complot ».
La marche est partie de Bab El Khadhra pour rejoindre les abords de l’avenue Habib-Bourguiba, sous un important encadrement sécuritaire. Les participants ont scandé « L’opposition n’est pas un crime » et brandi les portraits d’Ahmed Néjib Chebbi, Ayachi Hammami et Chaïma Issa, récemment incarcérés après la confirmation de leur condamnation dans l’affaire du « complot contre la sûreté de l’État ».
Même si la participation est restée limitée, cette mobilisation demeure significative dans un climat où les manifestations publiques sont étroitement surveillées.
Un mouvement qui s’inscrit dans une séquence plus large
La marche d’hier fait suite à deux autres rassemblements organisés fin novembre, notamment le 29 sur la place Pasteur et le 22 dans le centre-ville de Tunis. Ces trois mobilisations rapprochées s’inscrivent dans une dynamique protestataire croissante : selon l’Observatoire Social Tunisien (OST), 4 838 actions collectives ont été recensées depuis janvier 2025, contre 2 638 sur la même période en 2024.
La multiplication de ces rassemblements montre que la société civile, malgré ses divisions et la prudence des partis, continue de se mobiliser sur les questions de libertés publiques.
Le cortège a réuni des militants associatifs, des avocats, des étudiants et des familles de détenus. La présence de nombreux jeunes a été l’un des traits marquants de la journée. Plusieurs participants affirment avoir défilé pour défendre des principes – justice, droits civils, libertés – plus que des personnalités politiques.
Cette tendance confirme que la mobilisation dépasse les structures partisanes traditionnelles, souvent affaiblies, et repose de plus en plus sur des collectifs citoyens et des initiatives locales.
Un contexte tendu à l’approche de la grève du 21 janvier
La manifestation survient alors que le climat politique reste marqué par les arrestations dans le dossier du « complot ». Les condamnations définitives prononcées contre des figures connues ont ravivé les inquiétudes concernant l’usage politique des procédures judiciaires.
Parallèlement, un autre rendez-vous social se profile : l’UGTT a appelé à une grève générale le 21 janvier prochain, un mouvement qui pourrait prendre une dimension particulière après la séquence de mobilisations observées ces dernières semaines. Plusieurs observateurs estiment que les rassemblements actuels rappellent que la rue reste un espace d’expression politique, même lorsqu’elle n’est pas massivement remplie.
La prudence affichée par l’UGTT dans les marches de décembre contraste avec la portée potentiellement large de son prochain mouvement, ce qui ajoute une tension supplémentaire à la période.
Les organisateurs estiment que la mobilisation adresse un message clair : une partie de la société civile refuse la criminalisation de l’action politique et souhaite préserver l’ouverture de l’espace public.
La succession des rassemblements observés en novembre et en décembre confirme qu’un noyau de contestation demeure actif et que la question des libertés publiques continue de mobiliser.
Dans un contexte marqué par des tensions politiques et sociales, cette marche rappelle que la contestation n’a pas disparu du paysage tunisien.
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