La situation tendue persiste encore à Sidi Bouzid où de violents incidents se sont produits aujourd’hui avec des affrontements entre les manifestants et les forces de l’ordre, ces dernières en arrivant à user de gaz lacrymogènes puis de balles en caoutchouc pour disperser les protestataires.
Cette manifestation s’est faite à l’initiative du front progressiste du 17 décembre et du Comité du 17 décembre pour la protection de la Révolution qui réclamaient la libération des personnes arrêtées, le départ du gouverneur et du gouvernement.
Cette explosion de colère n’est pas fortuite mais intervient dans un contexte délicat et difficile caractérisé par une multiplication des dysfonctionnements au sein de l’administration à commencer par les coupures de l’eau et de l’électricité ou les retards pour le paiement des sommes dues aux employés des chantiers.
Mais ce qui est assez symptomatique chez les gouvernants actuels, c’est qu’ils n’entendent reconnaître aucune légitimité à ces manifestations qui prennent parfois un caractère violent, généralement provoqué, ou n’essayent pas de comprendre ce qui a poussé les citoyens à adopter ce comportement.
La faute est toujours rejetée sur les autres. C’est ce qu’a affirmé le ministre de l’intérieur, Ali Laarayedh, qui a accusé « des partis politiques d’être derrière ces troubles. Ce sont des minorités qui essaient d’imposer leurs opinions à la majorité ». Si le ministre de l’intérieur et un député de l’ANC adopte un langage flou, le bureau régional du parti Ennahdha est plus explicite en accusant ouvertement et directement Niodaa Tounes et ses partisans derrière ces manifestations. La section régionale d’Ennahdha de Sidi Bouzid a clairement dit que « des figures de Nidaa Tounes se sont alliées à des voleurs, des saboteurs, des vendeurs d’alcool et de drogue pour mettre la pression sur le gouvernement afin de libérer d’anciens délinquants. »
Si on lit bien ce communiqué ou si on écoute bien les déclarations du ministre de l’intérieur ou des gens proches de la majorité nahdhaouie, on ne peut s’empêcher de comparer ce discours par celui usité dans le temps par le régime déchu lorsque celui-ci évoquait les trublions, les délinquants et autres. Les raisons des troubles de quelque nature qu’ils soient ne doivent pas être recherchée dans la carence ou le manque d’efficacité des autorités concernées et par conséquent chercher à trouver les solutions idoines pour faire avancer les choses, mais chez les adversaires que l’on n’hésite pas à qualifier de tous les noms. D’ailleurs, le fait de les traiter de ne pas être patriotes apparait de manière assez claire dans ce discours, un discours dangereux qui rejette toujours la responsabilité sur les autres !