Aujourd’hui, c’est un livre que nous feuilletterons… Et quel livre ! Il s’agit du récit de la révolution tunisienne par l’ambassadeur français alors en poste à Tunis, Pierre Ménat qui dut, on s’en souvient, brusquement céder son poste au fantasque Boris Boillon, à l’époque le « chouchou » de la diplomatie française mais ce dernier fera long feu à Tunis et sera victime de ses excès voire son arrogance.
La liberté retrouvée d’un diplomate
Pierre Ménat vient donc de publier un ouvrage simplement intitulé « Un ambassadeur dans la révolution tunisienne ». Ce livre vient de paraitre aux éditions Pepper-l’Harmattan et sera bientôt disponible en Tunisie. Gageons d’abord que cet ouvrage deviendra un classique du genre.
En effet, outre les fuites relayées par Wikileaks et signées par Robert Godec, ambassadeur américain à l’époque, il n’y a pas eu de récit de la révolution tunisienne d’après un diplomate en poste. Il s’agit donc d’un texte de première main qui, probablement, oscille entre la confession, la réfutation, l’apologétique et le plaidoyer.
De fait, après un avant-propos dans lequel Pierre Ménat explique les raisons qui l’ont mené à écrire ce livre, l’auteur développe son récit en trois parties.
En prélude, Ménat souligne que son statut antérieur lui interdisait de prendre la parole ou la plume et que cette entrave levée et sa liberté retrouvée, il en fait maintenant usage. Dans le même esprit, il consacre une postface intitulée « Après Tunis » à son départ, à l’analyse de la transition tunisienne et à la réponse aux critiques émises à son encontre.
La première partie du livre navigue entre les illusions et les réalités de la Tunisie que l’ambassadeur Ménat a constatées à son arrivée dans notre pays en 2009. Il relève aussi bien les attentes de la scène politique que le caractère totalitaire et déphasé du pouvoir.
Il consacre ensuite une seconde partie au métier d’ambassadeur, à son travail de diplomate et son devoir d’analyse et de réserve.
Les dysfonctionnements de la perception française
Enfin, la dernière partie du livre revient sur la révolution tunisienne en trois séquences. D’abord, une réflexion sur le sens des termes, sur la différence entre une révolte et une révolution. Ensuite une minutieuse description des événements de janvier 2011 du point de vue, soulignons-le, d’un ambassadeur français. Enfin, une analyse des dysfonctionnements de la perception française de ces événements.
Maintenant que le départ précipité de ce diplomate fait partie de l’histoire, il est temps de revenir sur son action en Tunisie en écoutant son plaidoyer lucide et raisonné.
Il est également temps de saluer la parution de ce livre qui constitue une nouvelle pièce à ajouter au dossier de la révolution tunisienne. Avec son lot de révélations et ses confidences, « Un ambassadeur dans la révolution tunisienne » est un ouvrage qui mérite le détour et résonne haut et fort comme la prise de parole d’un homme longtemps silencieux à cause d’un devoir de réserve qu’il aura, fonctionnaire consciencieux, respecté jusqu’au bout.
Hatem Bourial