Près de dix jours après l’horrible carnage de Nice, il semble patent que le monde entier est passé à autre chose… en attendant le prochain attentat qui se devra d’être spectaculaire, horrifiant et sanguinaire.
La mémoire du court terme se dissout dans l’avalanche d’informations
L’émotion – au fur et à mesure que ces attentats se succèdent à un rythme effréné – retombe de plus en plus vite, un peu comme si nous zappions l’horreur pour continuer la sarabande de nos vies qui s’évanouissent dans ce climat liberticide et terrifiant.
Parfois, nous détournons simplement les yeux. Comme si cette hécatombe qui meurtrit les peuples irakien ou syrien ne comptait pas, comme si la terrible répression coloniale qui s’abat sur les Palestiniens ne nous concernait pas…
Puis, invariablement, au surlendemain de chaque drame, la compassion retombe comme un flan. Sommes-nous devenus amnésiques à cause justement de l’immédiateté de l’information et de ce flux sans fin de mauvaises nouvelles ?
On dirait que la mémoire sur le court terme se dissout dans les événements eux-mêmes et que nous sommes condamnés à regarder ailleurs de plus en plus vite.
Après les funérailles, le « fark » est un retour à la vie
Comme si à chaque fois, un « fark » symbolique nous séparait des victimes et des attentats et que nous regardions ailleurs car, justement, la vie reprend ses droits.
Un ami français me faisait ainsi remarquer que dans le monde musulman, le fait que l’on enterre les défunts le jour même ou le lendemain de leur disparition était éloquent d’une capacité à relativiser la vie et la mort.
Puis, il ajoutait que les cérémonies du « fark » qui se tiennent deux jours après l’enterrement tenaient plus du banquet joyeux que du conclave des pleureuses. C’est un fait que nos cérémonies funéraires font la part belle à la vie…
En état d’urgence émotionnelle
Toutefois, sur un tout autre plan, l’amnésie ne doit plus guetter lorsqu’il s’agit de terreur aveugle. je préconiserai même que les commémorations adoptent d’autres rythmes, d’autres formes.
Autrement dit qu’on n’attende pas un mois ou un an pour entretenir la flamme des victimes de ces crimes aveugles, qu’on se mette plutôt en état d’urgence émotionnelle pour que nos indignations et nos compassions ne retombent jamais et qu’au contraire, elles soient permanentes, ouvertes et s’élargissent à toutes les victimes des criminels de la foi falsifiée.
N’oublions pas et faisons en sorte que cette avalanche qui prétend nous emporter nous renforce contre ce mal terroriste et ses démons sans conscience.
H.B.