Au moment mĂŞme de ses funĂ©railles, alors que sa famille, ses nombreux amis et ses compagnons de route l’enterrent, j’Ă©cris ce billet pour rendre hommage Ă un grand homme, de ceux qui ont contribuĂ© Ă construire la Tunisie d’aujourd’hui, de ceux qui ont portĂ© l’indĂ©pendance politique acquise en 1956 Ă bout de bras, de ceux qui accomplissaient leur devoir avec la patrie au cĹ“ur.
NĂ© en 1931, Ali Daldoul figurait parmi les Tunisiens qui ont traduit notre indĂ©pendance dans les faits, instaurĂ© une dynamique de progrès dans le pays et veillĂ© aux destinĂ©es de la SociĂ©tĂ© tunisienne de banque (STB) dont il fut l’un des grands directeurs.
Aux côtés de la génération des pionniers, en compagnie de Hassen Belkhodja, avec enthousiasme et passion, Ali Daldoul avait mené plusieurs missions durant sa longue carrière. Retraité depuis de nombreuses années, il était demeuré très actif, toujours curieux de tout et illuminant mille et une conversations de son rire tonitruant.
On le voyait parfois, recherchant un livre ou suivant un débat à la librairie Clairefontaine dont sa regrettée épouse, Monique Semanaz Daldoul, était la figure la plus emblématique.
Après le lycĂ©e de garçons de Sousse et l’Institut commercial de Grenoble, Ali Daldoul avait entamĂ© sa carrière et occupĂ© plusieurs fonctions au sein de la STB et d’entreprises filiales. De nos jours encore, on raconte certains Ă©pisodes oĂą il s’Ă©tait distinguĂ© par son franc parler et son sens de la rĂ©partie.
A la STB, tous les anciens se souviennent encore de la manière dont il avait sauvĂ© les archives menacĂ©es par une inondation. En ce temps, ces archives se trouvaient dans un local de la rue des Tanneurs et, abandonnant ses chaussures et retroussant son pantalon, Ali Daldoul avait donnĂ© l’exemple en allant au charbon et en extirpant les documents du piège oĂą ils se trouvaient.
Cet homme que nous enterrons aujourd’hui a amplement mĂ©ritĂ© de la Tunisie. Issu de cette gĂ©nĂ©ration des fondateurs, il avait un regard lucide sur l’actualitĂ© et une mĂ©moire vive des longs combats qu’il a fallu mener pour sortir la Tunisie du sous-dĂ©veloppement. Notre dette est grande envers lui et, Ă travers lui, envers toute sa gĂ©nĂ©ration de responsables.
Qu’on me permette d’ajouter qu’Ă titre personnel, il me manquera beaucoup. Je le croisais de temps en temps, aux abords du marchĂ© Lafayette et nous discutions un brin. Et Ă chaque fois, il m’apprenait quelque chose sur notre histoire, nos vies, la vie. Notre dernière rencontre avait pris la forme d’un dĂ©jeuner avec des amis communs, les Ben Arfa et les Djellouli, et nous avions ri aux larmes tellement la joie fusait Ă chaque instant.
Paix Ă son âme et condolĂ©ances Ă sa famille. Son souvenir est impĂ©rissable…
