À Sfax comme ailleurs, les quartiers dits « populaires » ne sont plus seulement des zones à réhabiliter, mais deviennent des espaces stratégiques de transformation sociale, urbaine et économique. Grâce au partenariat entre la Tunisie et l’Union européenne, des projets innovants redéfinissent les contours du développement urbain.
C’est dans les rues rénovées de Markez Gaddour et de Cité Bourguiba, mais aussi sur les terrains de sport récemment aménagés à El Hajeb et Thyna, que se dessine discrètement une nouvelle approche de la ville.
L’ambassadeur de l’Union européenne en Tunisie, Giuseppe Perrone, en visite officielle à Sfax, n’a pas manqué de souligner la portée concrète de la coopération tuniso-européenne à travers ces réalisations visibles, portées par le programme PROVILLE 2.
Car derrière ces travaux d’infrastructure, ce sont des transformations profondes qui s’opèrent : de nouveaux espaces pour les jeunes, une réappropriation des lieux par les habitants, des dynamiques collectives qui se réactivent… Et un message : les quartiers populaires ne sont pas des marges à corriger, mais des centres vivants du renouveau urbain.
De l’infrastructure à la citoyenneté
Lancée avec le soutien de l’Union européenne, l’initiative PROVILLE 2 va bien au-delà du bitume ou des trottoirs. Elle repose sur une vision intégrée du développement urbain, qui associe infrastructure, inclusion sociale, culture et économie de proximité. Les quartiers ciblés sont traités non comme des problèmes à résoudre, mais comme des potentiels à révéler.
Cette philosophie se retrouve dans les actions concrètes menées sur le terrain : réhabilitation des voiries et réseaux, accès aux services de base, mais aussi création d’espaces publics, appui aux projets communautaires et accompagnement des jeunes vers l’emploi ou l’engagement citoyen. Il s’agit de recréer du lien social, de valoriser les identités locales, et de faire émerger une nouvelle urbanité, inclusive et participative.
Suivi des résultats : la méthode ARRU
L’Agence de Réhabilitation et de Renouvellement Urbain (ARRU), cheville ouvrière de ces projets, a organisé une visite d’évaluation dans les quartiers concernés par les programmes « Génération 1 » et « Génération 2 » du Projet de Réhabilitation et d’Intégration des Quartiers Résidentiels (PRIQ). Ces programmes ciblent les zones urbaines dites prioritaires, souvent laissées en retrait des dynamiques d’investissement public.
L’approche est double : interventions techniques (amélioration de l’habitat, réaménagement des espaces publics, voirie, éclairage) et actions sociales de terrain (médiation urbaine, sensibilisation, insertion professionnelle). Ce modèle vise à réduire les inégalités territoriales tout en favorisant la cohésion sociale. Une ambition rendue possible par le soutien européen, mais aussi par l’implication croissante des collectivités locales et des habitants eux-mêmes.
Une ville inclusive à portée de main ?
Ce partenariat stratégique entre la Tunisie et l’Union européenne dessine les contours d’un nouveau contrat urbain, basé sur la dignité, la justice sociale et la participation. Il reflète aussi une conviction : l’avenir des villes se joue dans leurs marges. C’est là que peuvent se réinventer les solidarités, les usages de l’espace, et les pratiques démocratiques.
À travers cette coopération, Sfax devient un laboratoire du possible, un terrain d’expérimentation pour une fabrique urbaine plus humaine et résiliente. Et si l’expérience venait à se généraliser, c’est tout le paysage urbain tunisien qui pourrait être transformé – par le bas, mais durablement.