Dans deux jours, les Tunisiens iront voter et je voudrais vous parler de ce choix qui pourrait être décisif pour les prochains scrutins. En effet, selon la configuration du vote, nous pourrions aller ou pas vers un second tour. Ensuite ce seront les élections législatives.
Comme chaque citoyen, je suis à la fois enthousiaste et inquiet. Il n’en reste pas moins que les choses avancent globalement alors que se redessinent les grands équilibres. Je ne cacherai pas ma tristesse devant la guéguerre des ego qui a transformé le camp moderniste en passoire.
Je ne cacherai pas ma désolation devant ce en quoi les députés sortants ont transformé le Parlement. Je ne tairai pas ma surprise devant le rendement des partis politiques censés me représenter. Enfin, je saluerai la discipline du monolithe islamiste qui nous donne à tous une leçon de réalisme, de patience et de stratégie.
J’avais il y a quelques années parlé de sprinters et de marathoniens pour comparer modernistes et islamistes. La métaphore reste valable même si personne dans cette vaste gauche fondée par Bourguiba et les communistes tunisiens, par les musulmans éclairés et leurs frères juifs et parfois chrétiens, par les nationalistes destouriens qui croient toujours en une Tunisie indépendante de l’arabisme et de l’islamisme, personne n’est véritablement fédérateur.
BCE l’a été à sa manière. Sans aller jusqu’au bout de ses intentions, trahi qu’il fut par ses lieutenants et les ambitions de son rejeton.
Qui pourra à gauche reprendre le flambeau et poursuivre l’aventure moderniste, la symboliser cette belle aventure née avec les Réformistes des siècles antérieurs puis amoindrie par les lectures autocratiques de Bourguiba puis celles sécuritaires de Ben Ali.
La Tunisie est à la croisée des chemins. Qui l’emportera ? Sera-ce le populisme et le poujadisme qu’il porte ? Ou plutôt l’islamisme et son projet théocratique lointain ? Sera-ce plutôt le modernisme progressiste qui se fraiera de nouveau un chemin à Carthage ?
Ou bien, ultime avatar de la Révolution, verrons-nous la majorité silencieuse l’emporter et enfin dicter sa loi à tous ces politiciens fourbes, retors et aventuriers qui ont sali l’idée même de démocratie ?