Le hasard fait bien les choses ! Ainsi me suis-je retrouvĂ© face Ă face avec Yves Marek dont la dignitĂ© d’ambassadeur de France ne lui a pas fait oublier son amour des Ă©checs et de son pays natal.
C’est au Kram, Ă la Cacciola de Omar Lasram, que nous nous sommes retrouvĂ©s et, très vite, la conversation s’est orientĂ©e vers le jeu d’Ă©checs.
Yves Marek a longtemps jouĂ© aux Ă©checs en Tunisie. Il avait jusqu’au dĂ©but des annĂ©es 1980 dĂ©fendu les couleurs de l’Avenir sportif de la Marsa puis du Club sportif des Municipaux. En 1978, il sera vice-champion de Tunisie, l’emportant sur les Nebil Doghri et autres Slim Belkhodja.
A l’Ă©poque, Yves Marek Ă©tait de tous les tournois d’Ă©checs et sillonnait le pays avec ses Ă©quipiers.
Il garde ainsi un pan de la mĂ©moire des Ă©checs en Tunisie. Par exemple, il vous racontera avec des mots choisis, l’allure patricienne de BĂ©chir Ben Cheikh ou BĂ©chir Kchouk lorsqu’ils se croisaient parfois devant un Ă©chiquier au CafĂ© El Alia Ă la Marsa.
Il vous racontera aussi le grand tournoi de Sousse en 1967, lorsque les plus grosses pointures mondiales s’Ă©taient rendues en Tunisie. Il vous racontera Ă©galement les tournois de Ramadan dans les cafĂ©s de la ville et les grands maĂ®tres internationaux qu’il a connus.
De Slim Bouaziz Ă Ridha Belkadhi, c’est une petite histoire des Ă©checs qui s’esquisse dans ses propos. C’est aussi celle d’une Ă©poque bĂ©nie comptait parmi les grandes nations du jeu d’Ă©checs.
Dans les annĂ©es soixante-dix, la Tunisie Ă©tait au niveau de la France. Nous faisions mĂŞme mieux puisque nous comptions deux grands maĂ®tres internationaux (Belkadhi et Bouaziz) alors qu’il n’y en avait qu’un seul en France, le fameux Bachar Kouatli, aux origines syriennes et devenu aujourd’hui le prĂ©sident de la FĂ©dĂ©ration française des Ă©checs.
Il aura fallu que les formateurs russes dĂ©barquent en France pour qu’elle nous dĂ©passe. De nos jours, le surplace de cette discipline en Tunisie a laissĂ© le champ libre Ă des pays comme le Maroc, l’Egypte ou l’AlgĂ©rie qui, Ă leur tour, nous ont dĂ©passĂ©.
Pour Yves Marek, il faudrait en Tunisie amĂ©liorer la qualitĂ© de l’entraĂ®nement pour progresser et relever le niveau. C’est d’ailleurs, constate-t-il ce Ă quoi s’est attelĂ© Tahar Battikh, le nouveau prĂ©sident de la FĂ©dĂ©ration tunisienne et lointain successeur du regrettĂ© Noureddine Tabbane qui avait beaucoup fait lors de ses mandats.
Toujours actif dans le domaine, Yves Marek prodigue des conseils, noue des contacts et n’hĂ©site pas Ă mouiller le maillot.
C’est ainsi qu’il a rĂ©cemment prĂŞtĂ© main forte Ă l’Ă©quipe tunisienne lors d’un match de prĂ©paration. Pour l’anecdote, vainqueur d’un maĂ®tre international français, Marek permis Ă la Tunisie de renforcer son capital points.
De mĂŞme, il Ă©tait de tout cĹ“ur avec les jeunes Amir Zaibi et Zoubeir Amdouni qui avaient portĂ© le drapeau du jeu d’Ă©checs tunisien en Georgie, lors des joutes de septembre dernier.
Longue et cordiale, la conversation nous a menĂ© Ă Ă©voquer bien des pages de l’histoire des Ă©checs lorsque Hichem Jaiet, Hamadi Nouisri, Khaled Tebourbi, Mohamed Adouani et BĂ©chir Almi portaient les couleurs du Club Africain sous la houlette de Hassen Nouisri.
De mĂŞme, nous avons Ă©voquĂ© les diffĂ©rents cercles Ă©chĂ©philes de l’Ă©poque dont le National Automobile Club, la Naceuria ou la Zitouna.
Pour Yves Marek, le plus important rĂ©side aujourd’hui dans une renaissance de la discipline. Pourquoi pas sous la houlette de formateurs russes comme le fit la France d’il y a cinquante ans? Pourquoi pas avec le soutien sobre et efficace d’un enfant du pays qui, mieux que quiconque, connait les beautĂ©s et subtilitĂ©s du noble art par excellence ?
Rencontre impromptue certes mais propos passionnants et prospectifs pour une discipline dont l’histoire n’est pas encore Ă©crite et dont l’avenir se dessine lentement.

