Sulfureux mais peu connu, Jean Lorrain compte parmi les dandys du dix-neuvième siècle finissant. Lors de ses nombreux passages en Tunisie, entre 1893 et 1899, Lorrain a laissé des pages éblouissantes et des descriptions rares des souks de Tunis.
Il est en effet parvenu Ă saisir les couleurs et atmosphères de ces souks et, dans une prose Ă nulle autre pareille, a restituĂ© cet univers. Quelques pages de ses « Heures d’Afrique » nous plongent dans les souks de Tunis, Ă l’image de ces extraits:
« Sous leurs voĂ»tes blanchies Ă la chaux et leurs toitures de planches disjointes, voici, baignĂ©s d’ombre et de lumière, les mille et un dĂ©dales du souk au parfums, du souk des tailleurs, du souk aux Ă©toffes, la citĂ© mĂŞme de la couleur, de la richesse et du clair-obscur(…)
Puis vous ĂŞtes au souk des parfums. Odeurs Ă la fois Ă©coeurantes et violentes d’essences de roses et de jasmin, c’est dans un long couloir-voĂ»te soutenu par des piliers au coloriage brutal, une double rangĂ©e de boutiques aux boiseries peinturlurĂ©es avec un goĂ»t barbare, une galerie de vĂ©ritables niches aurĂ©olĂ©es de cierges.
Au milieu de longs flacons de verre, peints d’arabesques d’or, de verre bleu pour le khĂ´l, de verre blanc pour les essences, des parfumeurs indolents et blafards se tiennent tout le long des jours ».
De belles pages qui disent bien les couleurs des souks de Tunis et tĂ©moignent du regard d’un Ă©crivain français dans les rues du Tunis de la fin du dix-neuvième siècle.
N.B: l’illustration de cet article est l’œuvre du photographe amĂ©ricain Franklin Price Knott, un pionnier dont des reportages sur la Tunisie sont parus en septembre 1916 dans la revue National Geographic.
