La soudaine remontĂ©e des cours Ă la Bourse a interpellĂ© les milieux financiers qui Ă leur grand dam n’ont pu dĂ©cortiquer le mĂ©canisme dĂ©clencheur de ce « revival » que personne n’ a vu venir. Surtout que le pays connaĂ®t une importante Ă©bullition entre la Troika et la sociĂ©tĂ© civile, qui comme chacun le sait, vient de prendre une tournure Ă l’aigre-doux depuis la commĂ©moration de la fĂŞte des martyrs.
En pulvérisant la barre emblématique des 5000 points, pour rebondir de près de 5% en une semaine, la physionomie du marché a bien changé par rapport à celle que nous observions lors des événements du 14 janvier, lorsqu’elle avait perdu plus de 11%. Tentons une explication.
Depuis quelque temps, une forte volatilitĂ© s’est abattue sur le marchĂ© des valeurs. On est loin des vibrations de faible ampleur qui sont normales comme dans tout marchĂ©. Il s’agit plutĂ´t de quelques supports qui ont particulièrement connu, ces derniers temps, des hauts et des bas avec des amplitudes rarissimes, que seule la spĂ©culation intempestive peut provoquer et dont le cumul a atteint près du double de la valeur initiale en quelques sĂ©ances de cotation. Cela a certainement permis aux vendeurs d’empocher des gains anormalement importants. Mais le « retour Ă la normale» peut nous faire vivre des chutes non moins vertigineuses des cours, parfois jusqu’Ă leur point de dĂ©part, sinon plus bas. De lĂ Ă en arriver au seuil de l’emballement gĂ©nĂ©ralisĂ©, il n y a qu’un pas! (phrase au sens ambigu)
La spéculation fait un retour en force
Passent les cas des introductions dont on sait la technique des « sur »-Ă©valuations souvent discutables; de la soi-disant rĂ©duction du nominal Ă 1 dinar et du tapage autour de la sociĂ©tĂ©, qui est prĂ©sentĂ©e Ă une communautĂ© d’Ă©pargne publique chauffĂ©e Ă blanc, avide et sans discernement. Laquelle achète Ă tour de bras sans compter, auprès de ceux qui vont « tout dĂ©baller » dès que le cours se sera gonflĂ© Ă bloc, non sans avoir au prĂ©alable brossĂ© un business plan par trop ambitieux que le raisonnable n’approuverait pas… Passent aussi les entreprises cotĂ©es qui ont Ă©tĂ© incendiĂ©es et celles qui connaissent de graves difficultĂ©s Ă rebondir, car travaillant dans des secteurs sinistrĂ©s… Non. il s’agit de vĂ©rifier pourquoi, en dehors des introductions et autres, il arrive que des valeurs jusque-lĂ tranquilles se mettent d’un coup Ă monter sans que rien ne les ait piquĂ©es. Puis, plonger sans que rien ne les ait titillĂ©es.
Cette volatilitĂ© a dĂ©jĂ inquiĂ©tĂ© les autoritĂ©s du marchĂ© ainsi que certains intermĂ©diaires qui ne trouvent aucune raison convaincante Ă ces mouvements tectoniques. Le Conseil du marchĂ© financier, qui est lĂ Ă veiller sur la crĂ©dibilitĂ© du marchĂ© et surtout sur son intĂ©gritĂ©, a lui-mĂŞme souvent demandĂ© des explications aux responsables de l’information financière auprès des sociĂ©tĂ©s cotĂ©es, qui rĂ©pondent gĂ©nĂ©ralement que de leur cotĂ© rien n’explique ce qui se passe Ă la bourse concernant leurs sociĂ©tĂ©s respectives.
Certes, le marchĂ© anticipe des annonces sur de simples rumeurs et, quand la rumeur s’avère fausse, les cours se corrigent. Non sans que les boursicoteurs dĂ©butants n’en payent le prix de leur aviditĂ©. Et lorsque c’est le cas, on leur rĂ©torque qu’ils devront faire attention la prochaine fois avant de se jeter dans la gueule du loup.
Prenons le cas de Air Liquide. Le titre qui cotait dans une fourchette de 300 dt plus ou moins, s’est mis soudain Ă monter, monter, monter pour atteindre en quelques bourses, près de 750dt. Le CMF est intervenu. Mais rien, il n’y avait rien Ă signaler. Or dès le lendemain, le cours de Air Liquide a plongĂ© en chute libre pour revenir dans les alentours du seuil de sa propulsion initiale. Imaginez un instant que vous ayez placĂ© votre Ă©pargne sur ce titre avant l’intervention du CMF et que vous perdiez en quelques jours plus de 50% de votre fortune. C’est grave! D’autant plus grave que la Bourse de Tunis n’est pas un marchĂ© Ă terme qui, lui, est proprement dĂ©diĂ© Ă la spĂ©culation pure et dure.
Excès de liquidités
Un tour de table des analystes aboutit Ă dire que c’est un excès de liquiditĂ©s qui, n’ayant pas Ă©tĂ© investi dans d’autres sites de l’Ă©conomie pour une raison ou une autre, s’est trouvĂ© en souffrance de placement en attendant que l’environnement soit propice. De lĂ , les seuls supports encore disponibles seraient les actions qui, sous la pression forte d’une demande consĂ©quente Ă un excès de liquiditĂ© monĂ©taire injectĂ©e par la BCT et en souffrance d’investissement, peuvent Ă leur tour, mathĂ©matiquement s’enflammer et crĂ©er sur la cote un effet systĂ©mique très volatil, trop dangereux pour les « peu » initiĂ©s et trop juteux pour les initiĂ©s et encore plus pour les initiĂ©s privilĂ©giĂ©s…
Pour autant, le mouvement Ă la hausse n’a pas perdu de sa vigueur. Mais attention, surtout que l’amorce du deuxième trimestre est en cours et que les analystes n’ont pas encore fini de dĂ©crypter les rĂ©sultats du premier trimestre 2012.
La voie de la raison
Un bon père de famille devrait bien rĂ©flĂ©chir avant de mettre la main dans sa poche. Un bon investissement est celui qui rĂ©alise une bonne combinaison de la liquiditĂ©, de la rentabilitĂ© et de la sĂ©curitĂ© de l’Ă©pargne. C’est la « Troika » gagnante, qu’offrent par exemple les bons du TrĂ©sor, c’est Ă dire l’État, en attendant que la bourse veuille bien s’arrĂŞter de s’exciter dans le vide, sachant que dans le meilleur des cas, le PIB attendu pour 2012 sera de 3,5% en espĂ©rant que son calcul se fera Ă prix constants!

