Intervenant, hier, devant la commission de lutte contre la corruption au sein de l’ANC, Nejib Mrabet, PDG de la compagnie des phosphates de Gafsa (CPG) a fait savoir que la société sert des salaires injustifiés correspondant à des emplois fictifs ajoutant que cette situation a vu le jour depuis les événements du bassin minier à Redeyef, en 2008.
Elle fait encourir à la société des pertes sèches de l’ordre de 50 milliards annuellement représentant des salaires indûment servis à 7400 personnes qui n’ont pas la qualité d’employés et n’ont aucune relation juridique avec la société. Un petit calcul arithmétique donnerait un salaire mensuel moyen de 566 dinars par personne.
Interrogé sur les raisons pour lesquelles il n’a pas réagi à cette situation intenable, Nejib Mrabet a indiqué qu’il en a avisé les autorités de tutelle depuis sa prise en charge de la direction de la société et que celles-ci n’ont pas donné suite à ses rapports à ce propos. Il a précisé que les bénéficiaires de ces salaires fictifs menacent de bloquer l’activité de production et de transport des phosphates si la société refuse de leur servir les émoluments qu’ils ont pris l’habitude de toucher sans contrepartie de leur part.
Les explications et les précisions apportées par le PDG de la société à ce sujet démontrent que le chaos et l’anarchie qui sévissent dans la compagnie ne remontent pas à janvier 2011, date du renversement de la dictature, mais bien avant cette date. Ces actes de relâchement ont pris naissance après le soulèvement du bassin minier à Redeyef où les jeunes de la région se sont révoltés contre le chômage et les injustices au niveau de la politique de recrutement dans la société.
Ils lui reprochaient de privilégier la candidature des personnes recommandées par les autorités locales et régionales sur la base de la parenté et de l’appartenance au RCD. Après le 14 janvier, la situation a empiré en ce sens que d’autres personnes de la région, en proie au chômage et à la pauvreté, exigent d’être engagées dans la société et bloquent ses activités.
L’autre remarque qui se dégage des explications fournies par Nejib Mrabet est que les emplois fictifs dans la société n’ont pas été crées sur instructions des autorités centrales ou par complaisance, comme c’est le cas dans plusieurs entreprises publiques et privées. Ils ont été imposés par les bénéficiaires eux-mêmes qui n’ont pas de sources de revenu et ont agi en désespoir de cause.
Les députés qui ont accédé à l’information ont été choqués par les révélations de Nejib Mrabet et se sont engagés à intervenir pour mettre fin à cette anomalie. Seulement, la gravité de la situation ne justifie pas un traitement brutal car à la base, le problème est social et la solution ne peut pas se ramener à des mesures légales. Une concertation avec les partenaires sociaux et les représentants de la société civile dans la région ainsi que le dialogue avec les titulaires des emplois fictifs sont fortement recommandés pour trouver une solution radicale.