Emna Chargui, la jeune internaute, accusée d’avoir partagée sur Facebook une sourate coranique détournée a comparu, ce jeudi 2 juillet 2020 devant le tribunal de première instance de Tunis pour « atteinte au sacré et aux bonnes mœurs ».
Cette affaire pour laquelle elle risque 3 ans de prison a été, de nouveau, reportée et le jugement sera rendu le 13 juillet prochain, selon son avocate Hela Ben Salem que nous avons contacté en marge de la comparution d’Emna Chargui.
Elle nous a précisé que le collectif des avocats d’Emna, composé de dix avocats, a présenté sa plaidoirie pour un non-lieu.
Le 28 mai dernier, la justice avait décidé de reporter l’audience alors qu’Emna Chargui s’était présentée en état de liberté devant la Cour correctionnelle du tribunal de première instance de Tunis.
Emna Chargui bénéficie d’un large soutien de la société civile. Au tribunal, Emna Chargui a pu compter sur le soutien de manifestants, militants pour la défense des droits humains.
Aujourd’hui, Khitem Bargaoui, représentante à Tunis de la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH) a insisté sur le caractère inutile de ce procès. « Il [le procès] n’a pas lieu d’être. Le procès qui devrait se tenir devrait être celui contre ceux qui ont appelé à violer et tuer Emna », a-t-elle dit.
« On peut comprendre que le texte heurte des sensibilités mais pas que cela aboutisse à un procès. En plus, il faut bien souligner qu’Emna n’a pas produit ce contenu, elle l’a juste relayé. Elle a voulu faire circuler des informations très importantes sur le virus, de manière différente, avec humour. C’est très décevant de vivre cela en Tunisie », a-t-elle ajouté.
De nombreuses organisations à l’instar d’Amnesty international ont d’ailleurs appelé les autorités tunisiennes à abandonner les poursuites contre Emna Chargui, estimant qu’il s’agit-là d’un exemple illustrant la poursuite d’atteinte à la liberté d’expression en Tunisie.
Emna Chargui avait partagée le 4 mai dernier, avant d’être convoquée le lendemain par la justice un statut, une publication parodiant le Coran et parlant de la pandémie du coronavirus. Elle a voulu faire dans l’humour en publiant ‘Sourate Corona’, mais elle a vite été prise à parti par des internautes au point d’être victime de campagnes de diffamation et de menaces.
« La poursuite d’Emna Chargui est une illustration de la manière (…) dont les autorités continuent d’utiliser des lois répressives pour saper la liberté d’expression », avait déclaré, hier Emna Guellali, responsable d’Amnesty international.
Cette étudiante, poursuivie en état de liberté, risque « une peine de prison pouvant aller jusqu’à trois ans simplement pour avoir partagé un message satirique sur Facebook », a déploré Emna Guellali. Selon Amnesty, « un tel procès envoie le message que toute personne osant exprimer une opinion controversée sur les réseaux sociaux risque d’être punie ».
La jeune fille a déjà été entendue par un enquêteur et a été déférée devant le ministère public. Une convocation qui avait d’ailleurs suscité de nombreuses réactions.
L’Observatoire national pour la défense du caractère civil de l’Etat, s’est indigné de constater qu’Emna Chargui ait pu être déférée devant le parquet pour atteinte au sacré et incitation à la violence alors qu’aucune poursuite n’a été engagée contre ceux qui ont proféré contre elle des menaces de mort.