Peut-on parler d’économie palestinienne dans le sens autonomique du terme quand les activités du commerce et de l’emploi sont liées territorialement à Israël et quand les ressources de l’Autorité sont biaisées par l’aide internationale ?
De prime abord, nous signalons que la quête de données relatives à l’économie de la Palestine est un exercice improbable sinon aléatoire. Cela tient du fait de l’absence d’institutions étatiques palestiniennes susceptibles de donner périodiquement les différents agrégats macroéconomiques.
Est-il utile de signaler que la Palestine n’a pas de Banque centrale au sens institut d’émission, elle ne dispose pas, par conséquent, de devise propre. Les accords d’Oslo de 1994 avaient interdit à la Palestine d’émettre sa propre monnaie. Elle utilise, par conséquent, des shekels israéliens et des dinars jordaniens.
Sans une Banque centrale en bonne et due forme – on parle juste d’autorité monétaire palestinienne – et une monnaie propre, comment est-il possible de calculer la valeur ajoutée d’une économie, agrégat à partir duquel on définit le PIB, le PNB, le revenu national, l’investissement ou encore l’épargne !
Faits et chiffres
Ce que nous donnons, ci-dessous, comme chiffres sur l’économie de l’Etat de la Palestine tient plus d’un recueil d’informations puisées dans des publications d’institutions internationales ou nationales (CNUCED, BM, direction générale du Trésor (France), etc.) que de statistiques provenant des autorités nationales palestiniennes.
Avec, bien sûr, tout ce que cela suppose comme distorsions ou manquements pour des raisons liées au penchant que l’Occident a pour Israël !
Commençons par l’aspect démographique : selon les derniers chiffres officiels publiés (année 2020), il y aurait 13,25 millions de Palestiniens dont 5,039 millions dans les Territoires Palestiniens (3,02 M en Cisjordanie et 2,02 M à Gaza). La diaspora compte 6,6 millions de Palestiniens (hors d’Israël), dont 3,4 millions de réfugiés, principalement en Jordanie, Liban et Syrie.
Une économie dépendante des financements externes !
L’économie de la Palestine est ostentatoirement de petite taille (PIB estimé à 14,6 Mds USD en 2019 à prix courant). Le PIB par habitant est faible comparativement aux pays voisins (2934 USD estimé en 2019 ; plus de 4000 USD en Cisjordanie et moins de 2000 USD à Gaza).
Vu l’état d’occupation des terres et les conditions d’accès précaires des Palestiniens, l’économie des territoires est, en partie, dépendante de financements externes assurés par les transferts de la diaspora, les revenus des Palestiniens qui travaillent en Israël, ainsi que par les bailleurs de fonds multilatéraux et bilatéraux.
En ce qui concerne le secteur de l’emploi dans les Territoires Occupées (TO), celui-ci est caractérisé par un taux de chômage élevé, autour de 30% de la population active, 52 % à Gaza, 18% en Cisjordanie, majoritairement des jeunes (48%).
Le dernier rapport de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) sur son programme d’assistance au peuple palestinien indique que 36% de la population palestinienne vit sous le seuil de pauvreté.
Sur le plan des échanges commerciaux des Territoires palestiniens (TP), ceux-ci sont caractérisés (source DG du Trésor – France) par la faiblesse des exportations de biens (7,6% du PIB) et leur faible valeur ajoutée.
Israël conserve sa place de partenaire commercial quasi-exclusif (82% des exportations / 55% des importations). L’Union européenne en revanche, second partenaire commercial des TP, renforce sa position (12% des échanges).
Une dépendance commerciale avec l’entité sioniste qui, ajoutée à la difficulté de circulation de la main d’œuvre, réduit à sa plus simple expression toute perspective de développement et d’émancipation des Territoires Occupées que la guerre ciblant Gaza a pratiquement anéantie.
Et comme pour aggraver les choses, la Palestine fait face à une baisse catastrophique du soutien de la communauté internationale. En 2021, l’aide totale des donateurs est tombée à 317 millions de dollars, soit 1,8% du PIB, une chute vertigineuse par rapport aux 2 milliards de dollars, soit 27% du PIB de 2008.
Difficile de parler de survie avec une situation aussi catastrophique.
Chahir CHAKROUN