Tunis Hebdo | La situation politique et économique en Tunisie ne semble pas vouloir se décanter. Les frappes américaines contre certains camps d’entraînement comme celui de Sabrata en Libye vont-ils déclencher une véritable prise de conscience de la gravité du contexte et l’urgence de lui trouver, au moins un début de solutions.
C’est cette forme de léthargie qui semble frapper nos institutions, nos hommes politiques mais aussi la société civile, qui est la plus inquiétante et celle qui nous alarme au plus haut point.
Rien ne semble déranger la quasi-indifférence qui continue de sévir dans le tissu sociétal et dans le monde politique, lesquels poursuivent « tranquillement » à vivre leur quotidien, sans réelle connaissance des risques encourus pour le pays entier à cause d’un individualisme aveuglé par l’absence totale d’un projet porteur commun à l’ensemble des Tunisiens, et d’un égoïsme effroyable où les intérêts partisans primaires prédominent au lieu et place de l’intérêt général du pays.
Cette torpeur politique et sociale est aggravée par la faiblesse manifeste des institutions de l’Etat et les dysfonctionnements qui les caractérisent donnant l’impression d’une grave carence au niveau de la gestion des affaires publiques qui peut avoir des conséquences encore plus désastreuses, lesquelles peuvent plomber le peuple et son avenir proche et lointain.
Rien qu’à passer en revue certains faits nous renseigne sur ce vide et cette déficience qui touchent le fonctionnement de l’Etat et la gestion du pays. A titre indicatif, un fait nous semble être d’une exemplarité particulière et confirme notre sentiment et notre analyse est celui qui a trait à ce que l’on pourrait désormais appeler communément « l’affaire du conteneur belge » !
Annoncé en grandes pompes comme étant une grande réussite à mettre au crédit de nos forces douanières qui auraient tendu un piège à ce « sombre » personnage, en le filant puis en le prenant en flagrant délit avec un conteneur rempli, parait-il, d’armes à feu, de cartouches, de combinaisons de plongée etc.
L’affaire en question avait fait, comme on le dit maintenant le « buzz » dans tous les médias et a provoqué un flot de commentaires et d’interprétations qui ont, presque tous, encensé ceux qui furent derrière cette remarquable « prise ». Et les premiers responsables de l’institution n’ont pas manqué de se mettre en évidence et en exergue, question peut-être de se mettre en avant !
Mais, voilà que quelques jours après, on découvre que le « dangereux terroriste » belge a été relâché parce que l’on s’est rendu compte, peut-être, que l’on s’était trompé sur la nature réelle des « armes » saisies et sur la personne elle-même. Or, cette relaxe du « suspect » ainsi que de son présumé complice ne fait, en réalité, que soulever d’autres interrogations qui pourraient déranger au lieu de mettre fin à une sordide erreur !
En effet, l’on se pose la question de savoir comment les institutions de souveraineté se comportent avec cette légèreté notamment à l’endroit de l’information et des médias. Une affaire de ce genre aurait dû être traitée avec beaucoup plus de discrétion, voire dans le secret le plus total afin de permettre de mener à bien l’enquête jusqu’à son terme, de déterminer avec exactitude tous les détails qui l’entourent et éventuellement toutes les conséquences qu’elle va entraîner avant d’en informer les médias.
Rien que cela démontre justement ce manque de rigueur de la part des « responsables » actuels qui courent tous désespérément derrière la notoriété médiatique au détriment parfois de la sécurité nationale ou de la justice et de leurs exigences.
Cela démontre aussi le manque de vision d’une politique de gouvernement globale et cohérente qui règle toutes ces questions avec des directives claires qui doivent lier tous les fonctionnaires et les agents de l’Etat, du plus haut gradé à celui qui est au plus bas de l’échelle ! Malheureusement ce n’est pas tout !
Lorsque des diplômés chômeurs pénètrent dans une institution éducative et violentent une enseignante à Foussana exigeant de travailler à sa place (sic !) ; lorsqu’un parent agresse un enseignant à Jelma après la traduction de sa progéniture devant le conseil de discipline ; lorsqu’à Menzel Bouzaiène des protestataires bloquent la route et s’emparent même des voitures administratives qui transportent le phosphate.
Lorsqu’à Jedliane, des habitants bloquent l’équipe chargée d’effectuer des études techniques et économiques sur l’éventuelle exploitation d’une mine de phosphate dans la région qui pourrait entrer en fonction en 2017 et qui pourrait donc créer des centaines d’emplois.
Lorsqu’à Sfax, des syndicalistes de l’hôpital universitaire Habib Bourguiba empêchent la tenue de la réunion de la commission médicale sous prétexte qu’ils sont opposés à la nomination de son directeur, on ne peut en aucun cas se montrer optimiste quant à la résolution des problèmes du pays dans l’immédiat, ou du moins, dans un proche avenir.
Car, ni les gouvernants ne semblent capables de prendre les mesures qui s’imposent dans ce genre de situations manquant peut-être de courage politique, ni les citoyens, ou du moins certains d’entre eux, ne paraissent avoir saisi la particularité de l’étape historique très délicate par laquelle passe notre pays.
Mais, il faut dire que ces derniers ne peuvent être remis sur la bonne voie que si les premiers démontrent d’abord leur capacité à éviter le chaos dans lequel on s’installe, doucement mais sûrement, et surtout à tenir les rênes…
L.L.