Les dernières statistiques de l’Institut national de la statistique (INS) confirment une mutation silencieuse mais profonde de la société tunisienne. Mariages et naissances connaissent un recul historique, tandis que la fertilité descend largement sous le seuil de renouvellement des générations, signalant un vieillissement accéléré de la population.
Chiffres clés : un recul marqué
- Mariages : 70 942 en 2024 contre 78 115 en 2023, soit une baisse de près de 10 % (plus de 8 000 unions en moins).
- Naissances : 133 322 en 2024 contre 147 242 en 2023, un recul similaire de près de 10 %.
- Fertilité : 1,7 enfant par femme, bien en dessous du seuil de remplacement des générations (2,1 enfants).
- Croissance démographique annuelle : 0,87 % pour la période 2014-2024, le plus faible depuis l’indépendance.
Ces chiffres, publiés dans la note mensuelle de l’INS et confirmés par le recensement général de la population et de l’habitat 2024, traduisent un tournant démographique majeur.
Transformations sociétales et économiques
Le recul des mariages et des naissances s’inscrit dans un contexte de profondes mutations sociales :
- Report de l’âge du mariage et allongement de la période de célibat.
- Retard de la parentalité, lié aux aspirations professionnelles et à la mobilité.
- Pressions économiques : coût de la vie, logement, emploi stable, influençant les décisions d’avoir des enfants.
- Évolution des modèles familiaux : individualisation et nouvelles priorités personnelles.
Comme le soulignait notre article précédent sur le Maghreb, « Le mariage en net recul au Maghreb, un bouleversement social en cours », la Tunisie n’échappe pas à cette tendance régionale, qui questionne les fondements traditionnels de la famille.
Conséquences pour la Tunisie
Cette mutation démographique entraîne des défis structurels :
- Vieillissement accéléré de la population et diminution du nombre de jeunes actifs.
- Pression sur le marché du travail, avec moins de nouvelles générations pour renouveler les compétences.
- Fragilisation des systèmes de retraite et de santé, alors que la proportion de seniors augmente.
- Répercussions sur les politiques publiques en éducation, santé et protection sociale.
Les experts alertent sur la nécessité de politiques publiques actives et ciblées pour équilibrer les structures par âge et assurer la durabilité des systèmes nationaux. Les démographes insistent sur l’urgence de mesures incitatives à la natalité, de soutien aux familles jeunes, et d’une adaptation des systèmes économiques et sociaux à une population vieillissante. Sans ces mesures, la Tunisie pourrait entrer dans un cycle de vieillissement irréversible, avec des impacts durables sur sa société et son économie.
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