Les transferts de fonds des Tunisiens résidant à l’étranger (TRE) devraient progresser de 6,4% en 2026 pour atteindre près de 7900 millions de dinars. Un montant record qui illustre le rôle central de la diaspora dans le financement de l’économie, mais qui interroge encore sur son orientation vers l’investissement productif.
Les prévisions présentées mercredi par Lotfi Fradi, chef de cabinet du ministre de l’Économie et de la Planification, lors d’un atelier régional à Tunis, confirment une tendance haussière. Pour 2025 déjà, les transferts sont attendus à 7600 MD, soit une progression de 8,3% par rapport à l’année précédente.
Dans une déclaration relayée par l’agence TAP, Lotfi Fradi a estimé que :
« Ce montant est important car il permettra au pays de faire face aux pressions relatives à la mobilisation des ressources de financement extérieur, toutefois, rapportés au PIB, ces flux n’ont pas évolué de manière adéquate. Il faut mieux sensibiliser la diaspora à l’investissement productif et à développer les incitations fiscales ».
Un levier encore sous-exploité
Aujourd’hui, une grande partie de ces transferts est consacrée à des usages traditionnels comme l’achat de logements ou de voitures pour les familles restées en Tunisie. Mais selon Fradi :
« La diaspora tunisienne est capable de lancer des projets d’investissement dans leurs régions et de devenir la locomotive de développement pour l’ensemble du pays ».
Le responsable a ainsi plaidé pour la création de fonds dédiés et pour un meilleur accès des expatriés aux emprunts extérieurs.
De son côté, Adam Elhiraika, directeur du bureau sous-régional pour l’Afrique du Nord de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), a rappelé le lancement en 2024 d’un programme reliant migration et développement dans six pays, dont la Tunisie.
Ce programme vise à exploiter les transferts de fonds comme moteur du développement durable, via une approche Sud-Sud fondée sur l’échange d’expériences. « La reconnaissance officielle des transferts comme source alternative de financement ouvre la voie à leur mobilisation stratégique », a-t-il expliqué, ajoutant que des réformes politiques sont en préparation pour intégrer ces flux dans le Plan national de développement 2026-2030.
Pourquoi une hausse attendue en 2026 ?
Plusieurs facteurs expliquent la progression anticipée :
- Le poids démographique d’une diaspora de plus en plus nombreuse et active en Europe et ailleurs.
- Le soutien accru aux familles, dans un contexte économique national difficile marqué par la rareté des financements extérieurs.
- Les politiques d’incitation, telles que les allègements fiscaux, les fonds dédiés et l’accès facilité aux emprunts.
- La valorisation institutionnelle, qui place désormais ces transferts au cœur de la stratégie nationale de développement.
Reste une interrogation majeure : ces flux financiers, essentiels à la stabilité économique, parviendront-ils à se transformer en véritables leviers d’investissement productif, capables de générer croissance et emploi dans les régions intérieures ?