Face au durcissement des règles sur les chèques, les entreprises tunisiennes redécouvrent les traites (ou effets de commerce).
Selon les dernières statistiques publiées par la Banque centrale de Tunisie, la valeur totale des traites émises durant les mois de février et mars 2025 a atteint environ 11,2 milliards de dinars, soit une hausse de 35 % par rapport à l’année précédente. Un bond significatif qui s’explique en partie par l’impact de la nouvelle législation sur les chèques, entrée en vigueur début février.
Malgré cette progression, la qualité des paiements reste préoccupante : près d’un milliard de dinars de traites ont été rejetées pour absence de provision, soit environ une traite sur dix. Le taux de rejet s’élève à 8 %, un chiffre que le financier Moez Hadidane qualifie de « stable » dans une déclaration à Express FM.
Autre signal fort : le nombre de traites émises au premier trimestre 2025 a littéralement explosé, avec une augmentation de 104 % par rapport à la même période de 2024. Une évolution qui traduit un changement d’habitude chez les opérateurs économiques, désormais plus prudents face aux risques juridiques liés aux chèques.
Les chèques en perte de vitesse
Le basculement est d’autant plus flagrant si l’on observe le recul des chèques non honorés : leur valeur a chuté de 48 % depuis l’application de la loi, tandis que leur taux d’impayé est passé de 2,4 % en 2024 à 7,2 % en 2025, et de 1,5 % à 4,1 % en nombre. Un pic observé durant les deux semaines précédant l’entrée en vigueur du texte, le 2 février 2025, selon Hdidane.
Le message est clair : les opérateurs économiques délaissent progressivement le chèque, devenu risqué, au profit de la traite, perçue comme plus souple, moins pénalisante, mais aussi plus vulnérable en cas de défaut de paiement.
La tendance devrait se poursuivre, selon les experts, et reconfigurer en profondeur les usages en matière de transactions interentreprises en Tunisie, où la confiance dans les moyens de paiement reste un enjeu crucial.