Dans son dernier rapport semestriel, le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES) alerte sur une explosion des mouvements de protestation en Tunisie, en hausse de plus de 100% par rapport à l’an dernier. Le document met aussi en lumière une augmentation inquiétante des violences, des cas de suicide et du climat de tension sociale.
Le rapport du premier semestre 2025 publié par l’Observatoire social tunisien (OST), rattaché au FTDES révèle qu’entre janvier et juin, le pays a enregistré 2387 mouvements de protestation, contre 1161 durant la même période en 2024, soit une hausse spectaculaire de 105,6%.
Les revendications à caractère professionnel et syndical constituent la majorité des mobilisations, avec des demandes portant sur la régularisation des situations professionnelles, le droit à l’embauche, le paiement des salaires et primes, ou encore la mise en œuvre d’accords sociaux restés lettre morte, notamment dans les secteurs de l’éducation et de l’emploi précaire. Selon l’OST, ces protestations ont représenté plus de la moitié des actions recensées.
La répartition mensuelle montre un rythme relativement stable des protestations :
- Janvier : 483 mouvements
- Février : 432
- Mars : 217
- Avril : 422
- Mai : 451
- Juin : 379
Tunis reste le gouvernorat le plus agité, concentrant environ 25% des manifestations. Elle est suivie par Kairouan (161 mouvements), Tozeur (147), Gafsa (138), Sidi Bouzid (107) et Nabeul (102).
Le rapport ne se limite pas aux mobilisations. Il recense également 65 cas ou tentatives de suicide, touchant majoritairement des jeunes et adultes actifs (70%), mais aussi 17 enfants et 3 personnes âgées. L’OST pointe un lien direct avec la pauvreté, le chômage et les conditions de vie dégradées.
Par ailleurs, le semestre écoulé a vu une hausse continue des actes de violence, qu’ils soient individuels, collectifs, institutionnels ou symboliques. La criminalité constitue la majorité des incidents signalés, avec une recrudescence des tentatives de meurtre, agressions, viols, vols et violence scolaire, cette dernière prenant parfois pour cible les enseignants et les familles.
Les hommes sont majoritairement impliqués dans les violences, souvent motivées par le désespoir, la frustration ou l’intimidation, avec pour victimes privilégiées les femmes et les enfants. L’espace public, incluant rues, hôpitaux, écoles et transports, demeure le théâtre principal de ces violences.
À cela s’ajoute une montée en puissance de la cyberviolence, souvent relayée ou banalisée dans certains discours politiques ou médiatiques.
Face à cette situation critique, l’Observatoire social tunisien exhorte les autorités à adopter des approches scientifiques pour lutter contre la violence et le mal-être social. Il appelle à renforcer l’éducation à la citoyenneté et à la non-violence, à développer des mécanismes d’intervention précoce dans les milieux scolaires et familiaux, et à repenser en profondeur les politiques sociales et économiques.