Les banques privées tunisiennes ont cessé d’accorder des prêts de plus de 15 ans afin de préserver leur rentabilité après l’entrée en vigueur, en janvier, d’une nouvelle réglementation imposant une réduction de 50 % des taux d’intérêt sur certains crédits à taux fixe et l’octroi obligatoire de prêts sans intérêt, rapporte Reuters.
Un cadre bancaire a confirmé avoir reçu des instructions verbales en ce sens, précisant que cette approche vise à éviter toute trace écrite pouvant exposer les banques à des sanctions. Deux autres responsables ont indiqué que cette décision permet de limiter les risques financiers et de protéger la distribution des dividendes aux actionnaires.
Le secteur bancaire tunisien, déjà sous pression, compte 19 banques privées, dominées par la BIAT et Attijari Bank, ainsi que quatre grandes banques publiques. Selon Fitch Ratings, la nouvelle régulation pourrait réduire de 11 % les bénéfices annuels des banques. Par ailleurs, la hausse de l’impôt sur leurs profits, qui passera de 35 % à 40 % en janvier 2025, risque d’accentuer la pression sur le secteur.
Mohamed Souilem, analyste financier et ancien directeur de la politique fiscale à la Banque centrale de Tunisie, estime que cette suspension des prêts longue durée pourrait fortement compliquer l’accès des Tunisiens aux crédits immobiliers et fragiliser davantage un secteur bancaire déjà en difficulté, ajoute Reuters.
Face aux tensions économiques, le président Kaïs Saïed a récemment critiqué les banques, dénonçant leurs marges excessives et le coût élevé de leurs services. Il a également suggéré une réforme de la Banque centrale pour permettre à l’État d’emprunter directement auprès d’elle, une option que les experts jugent risquée en raison de son potentiel impact inflationniste, rappelle la même source.