Nous avons toujours entendu parler de la situation exceptionnelle de la femme tunisienne. Ses droits, les différentes lois qui la protègent, Les postes importants qu’elle a pu occuper dans les différentes institutions à travers les années, le rôle qu’elle a joué lors de la révolution.
Nous nous vantons, considérant que la femme tunisienne jouit d’une place sans égal dans les autres pays arabes et musulmans. Et si nous scrutions les détails ?
Le Centre de recherches, d’études, de documentation et d’informations sur la femme (CREDIF) organise du 9 au 18 mai des journées autour de la lutte contre la violence contre la femme.
Une des formes du contrôle « mâle »
Lors de ces journées, le centre a cherché à faire la lumière sur la violence que la femme rencontre chaque jour dans sa famille, au boulot ou encore dans la rue et les moyens de transport.
Cette violence représente dans nos sociétés une des formes du contrôle « mâle » se basant sur les traditions et les mœurs qui, indirectement, initient au concept d’inégalité des genres qui induit finalement à la violence. Un véritable cercle vicieux.
Quels types de violence ?
La violence verbale et psychologique : insultes, moqueries, menaces
La violence physique : torture, coups, meurtre
La violence sexuelle : imposition de faire ou de dire des choses en relation avec les désirs sexuels
La violence économique : contrôle du salaire ou des entrées, privation du salaire
La violence institutionnelle : toute violence faite par les institutions contre la femme quant à ses droits économiques, sociaux, culturels, sanitaires ou politiques
Toutes ces formes de violences sont observées quotidiennement dans les espaces publics.
Les espaces publics concernés par cette étude ?
Les espaces de « passage » : quartier, rue, stations, moyens de transport
Les espaces de loisirs : cafés, restaurants, plages, parcs
Les espaces professionnels/de services
L’étude a montré qu’en dépit de la lutte de la femme depuis l’indépendance et des droits qu’elle a pu décrocher (notamment les articles 34 et 46 de la deuxième constitution de la République tunisienne), la femme tunisienne souffre toujours de diverses formes de ségrégation basée sur le genre dont la plus importante est la violence dans l’espace public.
Les chiffres présentés dans cette étude font froid dans le dos
Une femme sur deux a été victime de violence dans la rue, les moyens de transport, les cafés etc
82,5% des femmes sondées choisissent d’éviter de parler ou de rire dans les espaces publics afin de ne pas attirer l’attention
92,6% des femmes pensent qu’elles ne doivent pas attirer l’attention avec les habits et le maquillage
61% des violences sexuelles sont observées dans les espaces publics
30% des femmes du Grand Tunis ont avoué être cible de violence
88,5% des étudiantes sondées ont été victimes de violence dans les espaces publics
71,7% des femmes ont été victimes de violence psychologique dans les moyens de transport communs
82% des femmes victimes de violence physique préfèrent ne pas porter plainte contre l’agresseur
97% des femmes victimes de violence sexuelle préfèrent ne pas porter plainte contre l’agresseur
La violence gangrène notre société, une société qui considère toujours la femme comme un être inférieur et inégal à l’homme. On trouve toujours des raisons et des excuses pour expliquer ce phénomène maladif.
La solution ?
La femme tunisienne vit une fragilité économique mais surtout sociale. Une fragilité résultante d’une mentalité vieille de plusieurs dizaines d’années. La première chose à faire serait de mettre en place une politique nationale qui pourrait représenter une solution pour ce fléau.
Il faudrait également penser à lancer des campagnes de sensibilisation notamment dans les médias pour disséquer ce phénomène et essayer de le comprendre. Mais la plus radicale des solutions serait la mise en place d’un projet de loi qui assure la punition de l’agresseur et la réhabilitation des femmes tout en les protégeant.
I.B.