Plus d’un an et demi après la chute de Ben Ali, on pensait que la Tunisie avait définitivement (ou du moins en grande partie) clos le chapitre de la torture dans les geôles du Ministère de l’Intérieur et des postes de police. Malheureusement, la vérité est toute autre.
Faisant écho aux alertes répétées de plusieurs associations de défense des droits de l’homme comme Amnesty International, la présidente de l’organisation tunisienne de la lutte contre la torture, Radhia Nasraoui, a jeté un grand pavé dans la mare en déclarant, vendredi dernier, sur le plateau de la chaine TV Nessma, que la torture est encore pratiquée dans notre pays. Début août, Me Nasraoui avait déjà souligné, au cours de sa rencontre avec le Président Marzouki, qu’il était urgent de mettre fin à certains dépassements et atteintes aux droits de l’Homme, comme la torture, qui continuaient d’être pratiqués dans la Tunisie post-14 janvier.
Sur le plateau de Nessma donc, Me Nasraoui a évoqué le cas d’une jeune fille qui a été violée par deux agents de la police, à Ain Zaghouan, dernièrement. Des déclarations suivies dès le lendemain par un communiqué du Ministère de l’Intérieur qui confirme, sur sa page Facebook, les propos de Me Nasraoui et fait état de l’arrestation de trois agents de police, suspectés d’être les auteurs de ce viol collectif.
Aujourd’hui, le ministère de l’Intérieur publie un nouveau communiqué dans lequel il souligne la garde à vue de 4 agents, suite à la mort du jeune Abderraouf Khammessi. Ce dernier avait été arrêté le 28 août par les agents de la police judiciaire de Sidi Hssine pour son implication dans une affaire criminelle. Au cours de son interrogatoire, Abderraouf a été violenté sauvagement, comme l’indique d’ailleurs dans une vidéo un autre homme arrêté ce jour-là et conduit au même poste de police. Ce dernier décrivait les cris de Abderraouf qu’il entendait bien qu’il ne se trouvait pas dans la même pièce que lui.
Victime d’un traumatisme crânien, Abderraouf a été transféré à l’hôpital Charles Nicolle et placé en réanimation, jusqu’à sa mort, samedi dernier.
Ce cas n’est vraisemblablement pas isolé. Un autre jeune homme est décédé à Boumhel et, là encore, la police est pointée du doigt. Si le ministère de l’Intérieur n’a rien publié en ce sens, de simples citoyens essayent de mener l’enquête pour lever le voile sur ce qui s’est vraiment passé. C’est d’ailleurs au cours d’une enquête menée par Ayoub Messaoudi en ce sens que ce dernier a été arrêté durant une heure, alors qu’il filmait devant la maison du défunt.