Facebook et les réseaux sociaux n’ont plus d’yeux que pour Abdelfattah Mourou dont la prestation télévisée, dimanche sur “Nesma”, s’est avérée de plus convaincante.
Mesuré, fédérateur, développant une argumentation moderniste, le cheikh Mourou a démontré qu’il pouvait brasser très large et que sa voix portait vers tous les camps.
Ne ménageant ses piques ni pour Ennahdha ni pour les salafistes, Mourou (qui avait brocardé le démagogue Ghanim, il y a peu) se positionne, de plus en plus, comme un centriste de droite qui pourrait attirer sous son nom, aussi bien, le ventre mou de l’électorat, choqué par les récentes escalades extrémistes que les déçus du mouvement Ennahdha, qui sont de plus en plus nombreux.
Il est, en effet, révélateur que le «test» Wajdi Ghanim a démontré que la grande majorité des Tunisiens, y compris les pratiquants, ne se laisserait pas mécaniquement embrigader par Ennahdha et ses porte-voix dont le double discours et la fuite en avant commencent à lasser.
En ce sens, les fidèles de la mosquée d’El Ghazala ont donné un exemple éloquent en se retirant du lieu de prières lorsque Ghanim y a fait son entrée. Le même accueil a été réservé à ce prédicateur extrémiste à Sfax et dans plusieurs villes.
Ceci étant dit, les observateurs politiques constatent que le mouvement Ennahdha subit, avec la montée en puissance de Mourou, une double tension. À sa gauche, les salafistes trépignent d’impatience et multiplient les coups d’éclat. À sa droite, les conservateurs modérés et légalistes pourraient, désormais, être tentés par un bout de chemin avec la voie que dessine actuellement Abdelfattah Mourou.
Reste que tous les leaders actuels, et presque dans tous les camps, sont des femmes et des hommes du passé. En quoi pourraient-ils contribuer à résoudre les problèmes réels de la Tunisie ? La question peut se poser, car tout le débat politique, aujourd’hui, semble se situer sur des lignes de fracture idéologique.
Aujourd’hui, notre pays a besoin d’emploi et de développement équitable ? L’idéologie n’a jamais nourri personne ! Et c’est en ce sens que le pragmatisme d’un Mourou, d’un Caïd Essebsi ou plus à gauche d’un Néjib Chebbi pourrait désigner les voies de sortie de crise.
En attendant ces convergences qui se dessinent lentement, force est de constater que Moncef Marzouki semble, bel et bien, isolé par ses choix tactiques, alors que Mustapha Ben Jaafar tire, tant bien que mal, son épingle du jeu.
Qu’en sera-t-il après le congrès d’Ennahdha ? Et, surtout, la Tunisie peut-elle encore perdre du temps sur tous les fronts, alors que le pays s’enfonce dans une crise multiforme.
L’avenir proche nous dira si Abdelfattah Mourou participera à ce nouveau déploiement politique. L’avenir nous dira aussi si Ennahdha pourra résister à toutes ces tensions contradictoires en faisant passer l’intérêt de la Tunisie d’abord…
Quant au cheikh Mourou, tous lui reconnaissent une baraka légendaire qui pourrait, aujourd’hui, lui valoir un destin national…