La ministre des Affaires de la Femme et de l’Enfance, Mme Sihem Badi, a encore brillé par ses déclarations, aujourd’hui. S’exprimant dans le cadre du meeting « La femme, l’essor du pays « , organisé par le parti islamiste au pouvoir, Mme Badi a déclaré que la femme est exclue des postes de décision parce qu’elle a choisi l’Islam, le voile et le niqab, parce qu’elle a choisi de rester à la maison, des choix incompatibles avec certaines fonctions élitistes.
Une déclaration aussi controversée que contradictoire, encore une de ces déclarations auxquelles Mme Badi nous a habitués.
Quand Mme Badi affirme que les femmes sont exclues pour leurs signes extérieurs de religiosité, oublie-t-elle sciemment que ceux qui sont au pouvoir aujourd’hui sont islamistes, et par conséquent, ce sont eux qui s’opposent à la présence de la femme dans la politique? Le récent scandale de la chargée d’affaires en Finlande en est un exemple. Oublie-t-elle ou fait-elle semblant d’oublier que dans le gouvernement formé par Mr Laarayedh, il n’y qu’une seule femme ministre et deux secrétaires d’État? Qu’a-t-elle fait, elle, en tant que ministre pour promouvoir le statut de la femme et leur faciliter l’accès aux postes de décision ?
En affirmant cela, Mme Badi passe outre les véritables raisons qui empêchent la femme d’accéder aux postes de décision, à savoir une société misogyne et une mentalité séculaire, les conditions économiques, les devoirs familiaux et conjugaux qui l’accablent et entravent son émancipation et on en passe .
Aussi, cette déclaration est sujette à interprétation: celles qui sont aux postes de décision, les femmes qui accèdent au pouvoir, sont-elles pour autant des femmes « légères » puisqu’elles n’ont pas choisi l’islam, ni le voile et encore moins le niqab?
Cette déclaration n’est encore une fois qu’une tentative d’enjôler l’assistance, et au-delà d’elle, les femmes voilées, et de renforcer le clivage dans la société tunisienne. Ne pouvant faire table rase de son passé nahdhaoui, Mme Badi, ministre du CPR, très controversée et reconduite par Mr Larrayedh, ne rate aucune occasion pour s’aligner sur les positions des islamistes. Sa dernière « exhibition » sur l’avenue Habib Bourguiba lors de la manifestation de soutien à la légitimité organisée par Ennahdha n’est pas encore digérée que Mme Badi récidive.
Au lendemain de la Journée internationale de la femme, c’est une triste journée pour les femmes tunisiennes, insultées dans leur intelligence par leur propre ministre, scindées encore une fois en modernistes et conservatrices, et malmenées par un député de l’Assemblée constituante qui clame haut et fort que l’excision des filles relève de l’esthétique.