« Ce matin, la secrĂ©taire d’État Hillary Clinton a annoncĂ© que les États-Unis pourraient verser 100 millions de dollars Ă la Tunisie pour que le pays honore des paiements dus Ă la Banque mondiale et Ă la Banque africaine de dĂ©veloppement… si le Congrès amĂ©ricain le veut bien ! »
Lorsqu’Obama annonça le succès de la rĂ©volution tunisienne au Congrès amĂ©ricain, alors que les sondages pour un nouveau mandat le donnaient au plus bas de sa popularitĂ©, il Ă©tait convaincu que la minuscule Tunisie pourrait lui redorer son blason un tant soit peu. C’Ă©tait, en effet, dĂ©jĂ une rare occasion qui s’offrait Ă lui de pouvoir rĂ©unir les deux partis en un « stand up » solennel, qui quelque part « fĂ©licitait » le travail du prĂ©sident dĂ©mocrate en matière de politique Ă©trangère, que Hilary Clinton menait depuis la prise des responsabilitĂ©s dans le cadre de l’administration dĂ©mocrate. On comprendra plus tard le rĂ´le que les États-Unis ont jouĂ© dans le tĂ©lĂ©guidage des Ă©vĂ©nements du14 janvier, alors que Sarkozy n’avait pas vu venir un tel Ă©vĂ©nement, comme il vient de l’avouer.
Succès donc amĂ©ricain qu’il va falloir mener Ă bon port, surtout que les Ă©lections pour un deuxième mandat sont dĂ©jĂ Ă horizon visible et qu’il risque de perdre. D’autant plus si ajoutĂ© au peu de succès de sa politique pour la santĂ©, en plus d’une crise des « subprimes » ravageuse, ne vienne s’additionner celle de son incapacitĂ© Ă promouvoir la dĂ©mocratie amĂ©ricaine dans le monde, particulièrement sur cette zone hypersensible qu’est MENA (middle east and north africa) avec IsraĂ«l et les richesses pĂ©trolières au milieu.
Sauf que les choses se sont un peu corsĂ©es entretemps en Tunisie. Après un premier passage de transition avec Caied Essebsi, qui avait semble-t-il suscitĂ© la sympathie de pas mal de bailleurs de fonds et donateurs, la Tunisie se retrouve, en effet, depuis le 23 octobre, en plein dans les mĂ©andres de la politique gĂ©rĂ©e cette fois par le parti Ennahdha, tant redoutĂ©, il est vrai, par l’ancien dictateur qui en avait fait un Ă©pouvantail pendant qu’il pillait tranquillement l’Ă©conomie du pays.
Obama s’empresse alors de prendre les choses en main avec la nouvelle Ă©quipe, qui semble avoir du mal Ă mettre en route Ă la fois une assemblĂ©e constituante et une gouvernance dans un système « deux en un », unique en son genre. Il les reçoit aux États-Unis, on leur donne une leçon de savoir-faire en système dĂ©mocratique Ă l’amĂ©ricaine, un coup d’endoctrinement par ci, une formation pour rĂ©ussir un « market oriented economy » et hop le tour est, croyait-on, jouĂ©.
Pas vraiment, car dĂ©jĂ la gouvernance de la Banque Centrale annonçait que l’Ă©conomie est en rĂ©cession et que l’Ă©puisement des ressources par fortes doses de liquiditĂ©s n’a pas encore produit les effets escomptĂ©s des faiseurs de politique monĂ©taire. Surtout qu’avec 103 jours de rĂ©serves en devises Ă la clĂ©, contre 6 mois pour la norme, les conditions, qui avaient conduit au programme d’ajustement structurel de l’annĂ©e 1987, devenaient Ă nouveau visibles Ă l’œil nu.
De son cĂ´tĂ©, le chef du gouvernement tunisien, voulant tenter le tout pour le tout après Davos, s’est mis Ă chercher ailleurs les fonds nĂ©cessaires au renflouement de l’Ă©conomie, laquelle carburait jusque-lĂ par une relation primordiale avec l’Europe. Or, manque de pot, cette dernière passe par une phase oĂą ses propres membres la sollicitent sous peine de dĂ©clarer leur mise en faillite. Une faillite dont la menace a dĂ©jĂ fait trembler moult banques et organismes bailleurs de fonds, et qui le cas Ă©chĂ©ant se transformerait en une catastrophe systĂ©mique.
Tout au plus, lui a-t-on promis un soutien, qui cependant a du mal Ă se mettre en route, en attendant que quelques-uns veuillent bien recycler certaines crĂ©ances Ă Ă©chĂ©ance proche en un don pour financer quelques projets communs… De son cĂ´tĂ©, le gouverneur de la BCT n’en finit pas de griller sur la braise de peur de toucher le point de non-retour, celui de voir la Tunisie ne pas pouvoir, pour la première fois de son histoire, honorer sous sa gouvernance, le service de sa dette souveraine. Au risque d’y perdre sa crĂ©dibilitĂ©, il va mĂŞme jusqu’à annoncer des prĂ©misses de reprises avant de revenir Ă la rĂ©alitĂ©-cata. Cette approche a d’ailleurs fait un tollĂ© chez les analystes, qui depuis, prĂ©fèrent lire l’avis de la BCT Ă l’envers, pour y voir plus clair.
De l’autre cĂ´tĂ© de l’Atlantique, Obama, qui ne pouvait pas se prendre un fiasco tunisien sur la patate, ne s’en remet pas d’une telle tournure dans laquelle il joue son avenir. Il dĂ©cide, avec le FMI, de faire tandem pour au moins garantir l’endettement de la Tunisie, dont les notes des agences ont tendance Ă s’aggraver, risquant d’alourdir davantage le service de la dette, intĂ©rĂŞt et capital. C’est ainsi que Mme Clinton, après Christine Lagarde qui l’avait prĂ©cĂ©dĂ©e, ont annoncĂ© le soutien de la dette tunisienne, conjointement par le FMI (fonds monĂ©taire international) et le gouvernement amĂ©ricain de Monsieur Obama, que les rĂ©publicains attendent au tournant… Mais 100 millions de dollars, ce n’est pas des masses, diriez-vous. Oui, mais ce n’est pas aussi Ă©vident de les avoir. Vous savez, c’est le Congrès amĂ©ricain qui dĂ©cide en matière de flouze. Or, actuellement, il est Ă dominance rĂ©publicaine. Il nous faudra donc lĂ aussi prier !
