Les interprétations quant aux résultats de la visite de la délégation tunisienne présidée par le Premier Ministre, Mehdi Jomaa, dans quelques pays du Golfe ne semblent pas divergentes. Au contraire, elles sont quasi-unanimes quant à la «froideur», somme toute relative, de l’accueil mis à part peut-être aux Emirats Arabes Unis où sa réception fut considérée comme chaleureuse.
Autrement dit, les résultats attendus ne devraient pas soulever un optimisme démesuré voire même seraient loin d’être acquis ou d’aboutir aux promesses de soutien lâchées çà et là. Certes, la délégation tunisienne, et notamment les ministres qui ont accompagné Mehdi Jomaa ont été incapables de délimiter avec précision la portée de cette visite ou si les aides promises ou encore les promesses de réactivation des investissements seront concrétisées dans un proche avenir.
Cependant, il semblerait que si les Emiratis seraient prêts à mettre la main à la poche pour soutenir Mehdi Jomaa et son équipe, et à apporter leur soutien à la Tunisie afin qu’elle puisse passer sans encombres cette dernière période de transition, ce ne serait pas le cas du «Géant» régional, l’Arabie Saoudite.
La question qui se pose réside dans le fait de connaitre les raisons de cette hésitation saoudienne, et si cette dernière n’aurait pas lié son aide à des décisions politiques que la partie saoudienne aurait exigé de Mehdi Jomaa.
Cette question pourrait apparaitre à travers l’interview accordée par le Premier ministre au quotidien «officiel» du Royaume «Al-Riyadh» et dans lequel il a passé en revue l’amélioration de la sécurité, les prémices d’une stabilisation sociale et la détermination du peuple tunisien à retrouver la paix civile afin de repartir de l’avant.
Interrogé sur la décision du Royaume saoudien sur la classification des «Frères Musulmans» comme une organisation terroriste, Mehdi Jomaa a indiqué qu’il s’agit «d’une décision positive que nous partageons en Tunisie estimant que le terrorisme n’a pas sa place dans nos pays.» Il a ajouté que «la Tunisie est contre toute instrumentalisation idéologique, et que tout individu ne respectant pas la loi doit être combattu.»
Cela constitue-t-il un indice nous permettant de croire au conditionnement d’une éventuelle aide saoudienne à une décision des autorités tunisiennes de classer les «Frères Musulmans» comme étant une organisation terroriste ? Et les «Frères Musulmans» en Tunisie ne sont ni plus ni moins qu’Ennahdha, et dont le leader, Rached Ghannouchi, est l’une des figures emblématiques de leur structure internationale…
Autrement dit, Mehdi Jomaa est-il placé devant ce choix cornélien : sauver le pays ou préserver Ennahdha ? Dans les deux cas, l’option qu’il prendra sera fort complexe et pas facile du tout à assumer.