Le désaccord, pour ne pas dire le conflit, qui existe depuis plusieurs mois entre le ministère de la Justice et l’Association des magistrats Tunisiens n’est pas près de connaitre son épilogue. Au contraire, le fossé semble de plus en plus se creuser entre les deux parties pour deux raisons, l’adoption d’un texte de loi se rapportant à la mise en place d’une structure indépendante qui vienne prendre la relève du Conseil Suprême de la Magistrature et le mouvement des magistrats qui vient d’être décidé d’une manière unilatérale par le ministre de la justice qui s’est appuyé sur l’ancien conseil.
Les Magistrats, réunis hier au sein du Conseil National de leur association, ont exprimé leur refus catégorique des dernières décisions émanant du ministre de la justice et concernant le mouvement des magistrats. Ils considèrent qu’il s’agit de décisions illégales qui reproduisent les pratiques du précédent système qui sanctionnaient les magistrats indépendants et les militants de l’Association afin de permettre au pouvoir politique de domestiquer la magistrature. Ils soutiennent aussi leurs collègues qui ont refusé ce mouvement et annoncent la tenue d’un sit-in dont la forme et la date seront déterminées par le bureau exécutif de l’Association.
Ils dénoncent ensuite la campagne médiatique hostile contre les militants de l’Association menée par le ministère de la justice avec la complicité du syndicat pour cacher l’échec du ministère dans la gestion du dossier relatif aux magistrats.
Ils soulignent le droit des magistrats aux nominations, aux mutations et à l’avancement qui doit être décidé par un organe indépendant et légitime qui puisse garantir l’indépendance de la magistrature.
Ils ont ensuite invité l’ANC à former une commission d’enquête sur les récentes nominations et le mouvement relatif aux magistrats, et à la mise en place d’une structure indépendante qui se charge de la gestion de leurs carrières.
Enfin, ils se disent prêts à défendre leurs intérêts et préviennent ceux qui tentent de faire avorter le projet de mise en place d’une structure indépendante chargée de la justice judiciaire.
Cette motion de l’Association des Magistrats tunisiens démontre, si besoin est, que les nouveaux pouvoirs publics ne sont pas en compatibilité avec les principes de la Révolution tunisienne qui a appelé, entre autres, à l’autonomie de toutes les structures et institutions par rapport au pouvoir politique afin de limiter son influence, le plus souvent nocive.
On se pose aussi la question, pourquoi, le ministre de la justice, et par delà le gouvernement et Ennahdha, ne consentent-ils pas à accepter l’indépendance de ces structures (justice, information, élections) sinon pour les dominer voire même les mater pour ses propres intérêts !!!
On est bien loin des idéaux de liberté de notre Révolution…