Une femme est décédée à l’hôpital régional du Kef après avoir reçu plusieurs balles tirées par son mari, agent de la Garde nationale, en raison d’un différend familial.
Agée de 26 ans, la victime , Refka Cherni, était maman de trois enfants. Selon plusieurs sources, elle avait porté plainte à plusieurs reprises, dont la dernière date de vendredi 7 mai 2021, contre son mari agresseur sans que le procureur de la République ni les autorités sécuritaires ne donnent suite à sa demande.
Moins de 48h après sa dernière plainte, ce qui était à craindre a eu lieu. Le mari a par la suite été arrêté par une patrouille conjointe du district de sécurité nationale du Kef et son arme a été saisie.
Sur les réseaux sociaux le décès de Refka Cherni a relancé le débat sur la violence conjugale et les féminicides en Tunisie.
Dans un pays censé être « protecteur de la femme », la victime s’est vue refuser l’aide et le soutien qu’elle demandait et a perdu la vie après avoir eu le courage de dire « non » à son agresseur.
Les hashtags « Say Her Name », « Dites son nom » et « Refka Cherni » ont été partagés par des centaines d’internautes qui ont crié au scandale et dénoncé l’impunité et la banalisation de la violence contre les femmes, notamment dans les médias et les feuilletons que des millions de familles regardent.
« Refka avait porté plainte, à plusieurs reprises au commissariat de police pour violence conjugale mais en vain. Les agents parvenaient à chaque fois à enterrer la plainte.
La dernière fois, c’était vendredi soir et bien qu’elle ait présenté un certificat médical de 21 jours, « le substitut du Procureur de permanence n’a pas jugé utile d’arrêter l’assassin », écrit une internaute.
« Les féminicides sont devenus un phénomène sociétal et un fait politique, cependant dans nos médias ainsi que dans les œuvres dites “artistiques” nous continuons à promouvoir la masculinité toxique et la violence ».
« Rappelez-vous d’elle quand vous nous direz qu’il faut rester patiente, penser à la famille, aux enfants. Rappelez-vous d’elle quand nous disons que le patriarcat s’appuie sur les institutions de l’État, et qu’il tue. Rappelez-vous d’elle pour comprendre d’où vient notre haine », note une autre internaute.
Violence à l’égard des femmes en chiffres
Malgré sa législation saluée par tous, la Tunisie connait une récurrence des actes de violence amplifiée par la pandémie, le confinement général et la détérioration de la situation économique.
En 2020, la Ministre de la femme, de la famille et des personnes seniors, Imen Houimel, avait confirmé l’augmentation du niveau de violence à l’égard des femmes et des enfants malgré les procédures et la législation.
En une année, les unités de sécurité spécialisées dans la lutte contre la violence à l’égard des femmes avaient enregistré 65 mille plaintes réparties entre 19 mille plaintes déposées auprès des unités de la Garde nationale et 46 mille plaintes déposées auprès des unités de sécurité nationale.
Au cours de l’année 2019, le pouvoir judiciaire avait traité environ 3700 cas de violence contre les femmes. Concernant le numéro 1899, le ministère avait reçu environ 14 mille appels majoritairement liés à la violence contre les femmes.
Des chiffres qui traduisent la situation alarmante qui prédit que Refka ne sera, malheureusement pas, la dernière victime du féminicide.