Phrases terribles et malheureuses que celles proférées par Rached Ghannouchi : » Ce sont nos enfants », « Ils me rappellent ma jeunesse ». Personne n’a oublié en Tunisie ces saillies du leader intégriste, ces mots qui résonnent aujourd’hui aussi bien comme une incitation à la violence que comme une justification a priori des violences qui secouent actuellement la Tunisie.
Après une conférence de presse en début de semaine dans laquelle il demandait indirectement aux salafistes le respect de la loi, Ghannouchi n’a pas repris la parole.
Aucun responsable d’Ennahdha n’a encore condamné les violences en cours à Ettadhamen et Al Intilaka. Aucun CPR n’a pris la parole non plus. Seul Mohamed Bennour d’Ettakatol a eu le courage de condamner les agissements salafistes et par ricochet reconnaitre les erreurs tactiques de son parti engage dans une alliance contre nature qui devrait lui être fatale.
Quant à Rached Ghannouchi, on se demande pourquoi il se cache et répugne à prendre la parole pour condamner sans équivoque la stratégie des radicaux islamistes qui ont publiquement fait allégeance à Al Qaida.
Tiraillé par des soucis tactiques, hésiterait-il à faire passer son agenda partisan et idéologique après celui de la nation tunisienne? Chercherait-il plutôt par le silence a ne pas s’aliéner l’aile dure des faucons de son parti dont le soutien aux salafistes est aussi notoire que pleinement assume? Ou bien serait-ce une manière subtile et manœuvrière de se placer au-dessus de la mêlée?
Ghannouchi dont les atermoiements et le soutien aux courants wahabbites ont precipité ces crises successives en Tunisie manquerait-il de courage? Ou bien chercherait-il à adopter une posture absurde qui consisterait à se substituer à l’État tout en ne condamnant pas les atteintes à la surette de l’État?
Étrange Guide qui depuis son exil britannique a retrouvé la Tunisie un certain 30 janvier et continue à défrayer la chronique par ses silences et le clair-obscur qui entoure ses faits et gestes. L’homme qui fut gracié par Ben Ali se comporte aujourd’hui en État dans l’État, en institution hors institutions qui dicte ce qu’il doit faire à l’État tunisien.
Dans un geste de mépris, inconcevable après une révolution, le chef islamiste n’avait pas hésité à laisser nommer ses proches parents à la tête des ministères puis multiplier les déclarations empreintes d’une résistible volonté de puissance. Terrible situation qui mène la transition tunisienne vers la pire des impasses : celle de la violence politique et des confrontations armées.
Doit-on laisser celui qui n’est qu’un chef de parti faire la pluie et le beau temps? Doit-on continuer à se taire devant le délire d’un vieil homme qui prétend effacer deux siècles d’histoire tunisienne? Qui rappellera Ghannouchi à l’ordre républicain?
Car lui, comme son négatif Marzouki, semblent coupés de la véritable Tunisie et cherchent désespérément a s’accrocher a leurs illusions trompeuses.
Parlez Monsieur Ghannouchi, parlez et condamnez ceux qui s’égarent dans la violence, l’inquisition et les anathèmes. Parlez et méritez de la Tunisie comme les martyrs qui ont permis votre retour et les jeunes que vous écrasez de vos complicités. Parlez, soulagez votre conscience, ayez le courage de vous adresser a tous les Tunisiens et non plus qu’a ceux qui vous ressemblent.
Mais peut-être que vos passeports britannique et soudanais font de votre patriotisme quelque chose d’élastique et relatif. Car si l’avenir est incertain, il pourrait ne concerner que les Tunisiens qui ne croient qu’en leur drapeau. Alors que vous avez bel et bien démontré que la Tunisie n’est pas le seul de vos horizons.
Puisse Dieu vous pardonner. Mais l’histoire et les Tunisiens ne vous pardonneront pas. Brisez le silence, Monsieur Ghannouchi. Ayez enfin le courage de tourner le dos au terrorisme avec un Non franc et massif. Sinon, le destin qui vous attend sera au mieux celui d’une minable Leila Trabelsi et au pire celui d’un roitelet prisonnier de ses illusions.