Contre toute attente, Hizb Ettahrir s’est joint à l’UGTT, aux partis de l’opposition représentés au sein de l’assemblée nationale Constituante, à Nidaa Tounes et au Front Populaire dans leur condamnation des ligues de protection de la Révolution (LPR), accusées d’agression contre des militants et des partis politiques.
Lors d’une conférence de presse tenue hier, Ridha Belhaj, président de ce parti islamiste, a indiqué ouvertement et sans équivoque que ces ligues constituent une milice au service d’une partie politique sans la citer expressément.
D’après plusieurs personnalités et observateurs, cette partie politique n’est autre que le mouvement Ennahdha dont le président a qualifié les LPR de «conscience de la révolution», et son allié au pouvoir le Congrès pour la République dont le secrétaire général leur reconnaît la légitimité de l’existence et de l’action.
Cette déclaration de la part de Ridha Belhaj est surprenante en raison des affinités idéologiques entre Hizb Ettahrir et le mouvement Ennahdha au niveau des fondements culturels et conceptuels. De surcroît les deux partis islamistes sont censés avoir les mêmes jugements et la même position vis-à-vis de la gauche démocrate, l’opposition dite laïque et les modernistes qui sont la principale cible des LPR.
Tout le monde sait, en effet, que ces ligues sont soutenues par Ennahdha et que la plupart de leurs membres appartiennent à ce mouvement et ne le cachent pas. Si bien que leur remise en cause revient à remettre en cause le parti majoritaire au pouvoir et le fait de considérer qu’elles représentent une milice à son service est une accusation directe à leur encontre.
Mais le président de Hizb Ettahrir n’est pas allé jusqu’à appeler à la dissolution des ligues de protection de la révolution. Il s’est contenté, dans son discours accusatoire, de faire remarquer que ces ligues devaient être l’expression de la volonté révolutionnaire du peuple tunisien et ne pas se réduire à une milice à la solde de telle ou telle partie politique pour brouiller les cartes et semer la pagaille.
Les déclarations de Ridha Belhaj au sujet des ligues de protection de la Révolution interviennent à un moment où la violence politique a pris une tournure chaotique après le lynchage de Lotfi Nakdh à Tataouine, l’attaque des syndicalistes à la place Mohamed Ali et le boycott du meeting organisé dernièrement à Jerba par Nidaa Tounes.
Elles sont susceptibles de plusieurs explications. Il peut s’agir d’un message adressé aux autorités qui encourent le discrédit à travers leur soutien inconditionnel aux LPR comme il peut s’agir d’une manière pour se repositionner sur l’échiquier national en adoptant une position qui fait l’unanimité au sein de l’opposition et de la société civile.
Reste à savoir, maintenant, si son parti aura ou non droit de cité dans l’alliance prévue pour faire front à la violence politique !