L’affaire remonte au milieu du mois de juin lorsque le ministère des affaires religieuses a décidé d’interdire à Cheikh Houcine Lâabidi, président du Comité scientifique de la Mosquée de la Zitouna , de donner les prêches du vendredi et de le remplacer par un autre Imam. Cette décision a été prise suite à l’appel au meurtre lancé par le Cheikh contre les artistes qui ont exposé des tableaux jugés blasphématoires au Palais « Abdellia » à La Marsa. Mais ce dernier a refusé cette décision et a changé les serrures des portes de la mosquée pour empêcher l’accès au nouvel Imam et ses partisans.
Le ministère des affaires religieuses a introduit une action en référé pour le faire condamner à l’exécution de la décision. Seulement, le tribunal de Tunis l’a débouté de sa demande par jugement en date du 17 août 2012.
L’avocat de Houcine Laabidi, Maître Féthi Khémiri, qui est en même temps le chef du département des affaires juridiques et contentieuses au sein de la Mosquée (sic), a indiqué que le jugement vient confirmer l’indépendance de la Mosquée et l’autonomie de sa gestion
Juridiquement, cette explication ne traduit pas le sens du verdict rendu par le tribunal prononcé sur d’autres bases et pour d’autres motifs. En effet, l’objet de l’affaire consiste à obliger Cheikh Houcine Laâbidi à accepter la désignation du nouvel Imam et lui permettre d’accomplir sa mission. Mais, il s’y est opposé se prévalant de l’indépendance de la Mosquée et de son droit de nommer de manière discrétionnaire les cadres et agents de l’institution alors que d’après le ministère, l’indépendance n’inclut pas la désignation de l’Imam.
Selon la loi, ce débat juridique est une question de fond que le juge des référés n’est pas en mesure d’apprécier.
De ce fait, on ne peut pas affirmer que le tribunal de Tunis a reconnu l’indépendance de la Mosquée puisque la question ne relève pas de sa compétence. D’après les informations que nous avons pu recueillir à ce sujet, le rejet de la demande du ministère s’est basé sur l’incompétence du tribunal qui n’est pas habilité, de par la loi, à se prononcer sur le fond du litige.
Il est en revanche du ressort du tribunal administratif d’intervenir pour confirmer ou annuler la décision du ministère qui est une décision administrative se rapportant à un établissement public, en l’occurrence la Mosquée Zitouna. Cet établissement jouit certes d’une autonomie de gestion et d’une indépendance administrative et financière mais son représentant légal ne dispose pas de la liberté d’enfreindre aux lois de la république et de commettre des délits. De surcroît, l’indépendance n’exclut pas le droit de regard de l’autorité de tutelle qui doit veiller au respect de la légalité ayant la compétence de prendre toute mesure qu’elle juge utile en cas de non respect de la loi ou en cas de dysfonctionnement de l’institution.